Skip to main content
Lc

2022/11/07 – Lc 17, 1-6

By 2024-01-04No Comments

Un jour, j’ai assisté à une messe dominicale où, dans son sermon, le curé est sorti de ses gonds parce que le texte de l’évangile proposait un thème qu’il ne voulait pas aborder: le divorce. J’étais plutôt amusé de sa frustration, mais le visiteur qui m’avait accompagné à la messe était un peu choqué. Ce dernier avait suivi quelques cours de théologie où il avait appris qu’on ne s’en prend pas à un texte sacré qu’on doit méditer ou expliquer : il faut toujours le justifier, lui trouver un sens édifiant, l’élever à l’ordre de ce qui est parfait. Au texte sacré, on ne peut rien ajouter ou retrancher. Il faut l’accepter tel qu’il est, en résistant à toute tentation de le remanier ou de lui trouver des insuffisances.

Pourtant, il me semble que l’évangile d’aujourd’hui est plutôt décousu. Sauf respect pour l’auteur sacré, on peut relever que ce texte contient trois thèmes différents, réunis sans aucun souci de cohérence, et sans aucun effort pour ménager les transitions. Il y a d’abord le thème du scandale. Jésus maudit quiconque entraîne au péché « un seul de ces petits. » Vient ensuite le thème du pardon à accorder obligatoirement, même sept fois, à celui qui se repent d’avoir commis une faute contre nous. Il y a enfin le thème de la foi : Jésus affirme que celui qui en est armé peut se faire obéir d’un grand arbre auquel il commanderait de se déraciner. Ailleurs, l’évangile va jusqu’à dire que la foi peut déplacer les montagnes!

Sans chercher à établir des liens entre ces trois thèmes, voyons ce que nous pourrions dire de chacun d’eux. D’abord, on peut se demander comment comprendre cette déclaration apparemment excessive : « Mieux vaut pour lui qu’on lui attache au cou une meule de moulin et qu’on le jette à la mer plutôt qu’il ne fasse tomber un seul de ces petits. » Cette phrase très dure ressemble à une sentence capitale contre celui par qui le scandale arrive. Mais le mot « scandale » est un peu piégé : Jésus ne vise pas le simple pécheur qui, comme nous tous, pourrait un jour être pris en flagrant délit de mauvais exemple. Il condamne plutôt celui qui, très sciemment, fait la promotion du péché et assume sans ambages le rôle de tentateur ou la profession de « faire tomber », d’entraîner au péché les plus vulnérables de ses frères et sœurs. Ce qui est en cause ici n’est pas le simple mauvais exemple accidentel, mais plutôt le pacte avec Satan, le tentateur par excellence.

Il est plus facile de saisir le point suivant. Jésus nous enjoint de pardonner sans compter. Répétons-le : même sept fois. Ailleurs, il va même plus loin : soixante-dix-sept fois sept fois, c’est-à-dire toujours. Mais le pardon n’est pas inconditionnel. Jésus précise que le pardon suit le repentir. J’adore cette précision parce que j’ai vécu dans un contexte où beaucoup de pasteurs chrétiens enjoignaient au bon peuple de pardonner à des assassins impénitents. Ces prêcheurs demandaient d’accorder automatiquement l’absolution à des gens coupables de génocide et de crimes contre l’humanité mais qui, jouissant de l’impunité absolue, n’éprouvaient aucun regret et ne sentaient aucun besoin de demander pardon à qui que ce soit.

Quant au troisième thème, la foi qui déracine de grands arbres ou déplace des montagnes, je l’associe à l’espérance rebelle. Je n’ai jamais été capable de penser la foi sans l’espérance. C’est la seule manière d’échapper à la sottise qui confond la foi avec la certitude de type scientifique. L’image du déracinement d’un grand arbre ne signifie pas que la foi permettrait des exploits magiques. Le passage donne à comprendre que la foi fournit des raisons de vivre, de lutter, de durer et d’endurer malgré toutes les incertitudes.

Melchior M’Bonimpa

 

 

 

Leave a Reply