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Lc

2022/10/22 – Lc 13, 1-9

By 2024-01-04No Comments

Dans tout ce passage, Jésus enseigne avec insistance l’importance du moment présent. La nostalgie du passé et le rêve de l’avenir détournent du présent, qui seul est à notre portée. Nos décisions et nos actions se déroulent dans un présent qui prépare notre avenir. C’est dans ce présent qu’il faut veiller fidèlement, pour se convertir, s’engager et produire des fruits.

Deux accidents tragiques viennent de se produire. Les Galiléens, dont il est question ici, étaient probablement des nationalistes zélotes, qui auraient perturbé l’ordre dans le Temple et provoqué la réaction violente du gouverneur. L’autre incident, la Tour de Siloé s’est peut-être écrasée en raison des travaux commandés par Pilate pour améliorer l’approvisionnement de l’eau à Jérusalem.

Le peuple opprimé par les Romains lutte pour obtenir justice.  Mais Jésus a le courage de dire à ses compatriotes que leur cause ne justifie pas les moyens violents pour la défendre. Il s’oppose à la révolte, mais également à la soumission. Il les prévient que s’ils laissent libre cours aux passions de vengeance et de haine dans leur cœur, ils se détruiront eux-mêmes. L’unique voie de salut, c’est la conversion du coeur.

Dans la tradition biblique, le figuier est un arbre fruitier qui représente le peuple. La fidélité d’Israël à son Seigneur se mesure aux fruits que l’arbre produit. Le délai de produire des fruits, dans la parabole de Jésus, signifie l’absence prolongée de conversion, de retour à Dieu dans la foi. La disparition du figuier annoncerait la destruction de la nation. Le propriétaire de l’arbre, c’est Dieu, tandis que le vigneron est la figure du médiateur entre Dieu et le peuple, le Christ Jésus. Le plaidoyer du vigneron en faveur du figuier obtient un sursis d’une année, mais, même si la condamnation est reportée à plus tard, le jugement menace toujours. À la fin, le vigneron est obligé d’admettre qu’il sera juste de couper l’arbre, si les dernières mesures pour le rendre productif ne produisent aucun effet.

Jésus montre un ferme courage pour ne pas dévier de sa mission et de son message du salut. La foule, outrée par les répressions révoltantes du gouverneur, attend que Jésus, galiléen comme les victimes, condamne Pilate et prenne même la tête d’un mouvement populaire de résistance. Le courage du Christ consiste à refuser de suivre la foule dans son appétit de vengeance. Il l’apostrophe, au contraire, affirmant que tous ceux qui l’écoutent ont besoin, eux aussi, de se convertir. Jésus élève le débat au niveau du coeur et de la conscience de chacun.

Ce serait une erreur de penser que les victimes qui ont péri méritaient leur sort à cause de leurs péchés. Ayant évité une mort tragique, les juifs de la foule pourraient penser qu’ils sont innocents. En présence du Christ, nous sommes toujours ramenés à notre conscience. Nous devons sans cesse résister à nos illusions que notre idéal sublime et nos pensées généreuses nous rendent purs et sans reproche. « Le triomphalisme » de notre Église nous a peut-être entraînés à nous fier à cette fausse bouée de sécurité. N’oublions jamais que notre seule sécurité qui nous donne assurance devant Dieu, c’est notre humble défiance de nous-mêmes : « C’est lorsque je suis faible (à mes yeux) que je suis fort (de l’amour et de la force de Dieu) » (2 Cor 12,10).

Cet appel à la conversion de la part du Christ engage notre responsabilité personnelle. Nous sommes tentés d’oublier cette responsabilité, en nous appuyant sur la promesse infaillible de Dieu. Jean Baptiste dénonçait cette fausse sécurité : « Ne vous mettez pas à dire en vous-mêmes : ‘Nous sommes les descendants d’Abraham’ (héritiers de la promesse de Dieu) (Luc 3, 8). Une autre illusion de sécurité consiste à diluer notre responsabilité personnelle dans le prestige de l’Église à laquelle nous appartenons.

Le jugement est inévitable et imminent, car la conscience de chacun le juge immédiatement. Nous avons connu une époque où prévalait la peur du Juge et des peines qu’entraînerait une condamnation. En réaction, nous avons éliminé l’image d’un Dieu menaçant. Par la suite, nous en venons à penser que nos décisions n’ont pas de conséquences. Si notre responsabilité s’évapore, nos actions ne seraient que de l’air qui passe, elles n’auraient pas de valeur. Qu’on le veuille ou non, le jugement se réalise aussitôt en nous, car nos actions nous suivent, elles sont inscrites en nous-mêmes.

Jésus nous invite à observer et à comprendre les signes des temps. Pourquoi sont-ils aussi importants ? C’est que Dieu agit et se révèle dans le temps de notre histoire collective et individuelle. Dieu est à l’œuvre dans notre monde : « Mon Père est continuellement à l’oeuvre et moi aussi je suis à l’oeuvre » (Jn 5,17), dit Jésus. Il nous parle et nous interpelle par les événements qui s’y déroulent et qui sont des signes pour ceux qui y prêtent attention.

La vie que le Créateur nous accorde ne nous appartient pas, elle nous est prêtée pour une brève période. C’est un pèlerinage au cours duquel il faut prendre une décision fondamentale et radicale. Notre conversion n’est jamais parfaite, car elle comprend le détachement de tout ce qui n’entre pas dans le projet de Dieu pour chacun(e) de nous, Jésus nous dit que chaque instant de notre vie est important, riche de décision, pour entrer de plus en plus en communion avec le Seigneur et son plan d’amour pour nous.

Jean-Louis D’Aragon SJ

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