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JnNon classifié(e)

2023/05/01 – Jn 10, 11-18

By 2024-01-04janvier 14th, 2024No Comments

Le pasteur et le mercenaire

La différence centrale entre les deux, c’est que le pasteur, animé par l’amour, se dévoue pour ses brebis, au péril de sa vie, tandis que le mercenaire (les Pharisiens) ne remplit sa fonction que pour son intérêt personnel. C’est la différence radicale entre l’amour, qui s’étend jusqu’au don total de soi-même, en opposition à l’égoïsme possessif, qui essaie de dominer et de posséder tout ce qu’il touche.

Entre Jésus et les chrétiens s’établit une connaissance réciproque, qui reproduit la connaissance intime entre Jésus et son Père. Cette connaissance n’équivaut pas simplement à un savoir, mais à une ouverture entière à l’autre, que l’on connaît et à qui on se donne. Aussi Jésus exprime-t-il son union mystérieuse entre lui et son Père par leur connaissance mutuelle : « Je connais le Père et le Père me connaît. » C’est l’amour qui donne l’intensité à cette connaissance mutuelle.

La préoccupation de Jésus pour ses brebis déborde les limites d’Israël, car il veut donner la vie à tous les humains. (v.16) Des Juifs croyants et des païens convertis, Jésus formera un seul troupeau, uni par la foi à l’unique pasteur.

L’amour du Père et de Jésus

L’amour du Père pour son Fils, Jésus, se prolonge dans l’amour du Christ pour ses brebis. Comment l’offrande de sa vie par son Fils peut-il susciter l’amour de son Père? Considérée d’un point de vue humain, en dehors du réseau d’amour en Dieu, ce don de sa vie peut paraître du masochisme de la part du Fils et du sadisme de la part du Père. Dans un séminaire interdisciplinaire, un intervenant, après avoir entendu cette affirmation que le sacrifice de Jésus était la source de notre libération, me lança avec émotivité cette objection: « Mais c’est du sadisme! » C’est vrai du point de vue d’une psychologie purement humaine qui ne parvient pas à découvrir l’amour dans un si grand mystère.

Seul, celui qui croit à l’amour mutuel et infini du Fils pour le Père peut réussir à soupçonner et à comprendre le mystère de ce don total. Jésus, le Fils, rassemblant toute l’humanité en lui-même la réunit à Dieu, son Père, dans cette offrande empreinte de confiance. Le péché radical de l’homme, par lequel il détruisit son union à Dieu fut la défiance. Cette rupture de la confiance, l’homme l’étendit ensuite à ses semblables. Combien de fois ai-je entendu quelqu’un s’écrier: « Moi, je ne fais confiance à personne, » c’est-à-dire je détruis toute relation avec les autres.

Confiance et liberté dans le sacrifice

Jésus donne sa vie, se livre totalement à Dieu. Il exprime par ce don de lui-même sa confiance et son obéissance au Père, qui accueille ce sacrifice pour rétablir la communion de l’humanité avec lui, la source unique de la vie. Mais, pour être un sacrifice authentique, il doit être libre, inspiré par l’amour. Autrement, il ne vaut rien: « Je pourrais livrer mon corps aux flammes. si je n’ai pas l’amour, cela ne sert à rien » (1 Cor 13,3).

Jésus insiste sur cette liberté de son amour dans le don de lui-même: « Je donne ma vie pour la reprendre ensuite. » L’amour mutuel du Père et du Fils est tellement intense, que Jésus peut affirmer en même temps qu’il donne sa vie et qu’il a le pouvoir de la rependre. Pourtant il ajoute que « c’est le commandement que j’ai reçu de mon Père. » Jésus est libre dans son obéissance, elle ne lui est pas imposée, parce qu’il l’imprègne de son amour. Une obéissance imposée serait un travesti, qui pervertit la disponibilité confiante à Dieu.
Partout ailleurs, on attribue la résurrection au Père. Nous avons ici le seul passage où c’est Jésus, le Fils, qui se ressuscite lui-même, affirmant ainsi que le Père et le Fils sont un dans leur agir, dans la création de l’univers, dans l’histoire humaine et dans la résurrection: « Tout ce que le Père fait, le Fils le fait également » (Jn 5,19).

Jean-Louis D’Aragon SJ