Skip to main content
Mc

2023/04/15 – Mc 16, 9-15

By 2024-01-04janvier 14th, 2024No Comments

L’Évangile de Marc se termine d’une manière étrange. La conclusion de cet évangile s’inspire des trois autres, mais la rédaction particulière de ce passage provient d’un auteur inconnu. Celui-ci n’avait pas pour but de présenter des récits circonstanciés des apparitions du Ressuscité, mais de rappeler une série de scènes que ses lecteurs connaissaient déjà. Il voulait leur fournir un aide-mémoire des apparitions du Seigneur ressuscité, que les chrétiens pourraient utiliser dans leur annonce de l’Évangile.

Comme ce résumé des apparitions du Ressuscité emprunte aux trois autres évangiles, il est certainement postérieur à ceux-ci. Le plus récent étant celui de Jean, vers l’an 95, l’auteur de cet ensemble l’a rédigé autour de l’an 100, probablement à Rome, lieu de la rédaction de l’Évangile de Marc.

Une finale décevante ?

Suivant l’exemple de Marc, les trois autres évangiles introduisent le chapitre sur la Résurrection par la visite des femmes au sépulcre de Jésus. Chez Matthieu et chez Luc, elles s’acquittent de la mission céleste qu’elles reçoivent d’aller annoncer aux disciples que leur Seigneur est ressuscité. Chez Marc, elles ne remplissent pas l’ordre reçu, mais « elles s’enfuient loin du tombeau, car elles sont toutes tremblantes de crainte. Elles ne disent rien à personne, parce qu’elles ont peur. » (16,8)

Cette conclusion de l’évangile a paru abrupte et énigmatique. Comme on ne comprenait pas que cette Bonne Nouvelle puisse se terminer sur cette scène des femmes en fuite, on a cru opportun de la compléter en lui ajoutant un condensé des apparitions du Ressuscité, qui circulait depuis quelques années, indépendamment du deuxième évangile.

Un aide-mémoire pour les missionnaires !

L’apparition du Ressuscité à Marie Madeleine résume le récit détaillé qu’on lit dans Jean 20,11-18. À ce résumé, on signale la peine de « ceux qui avaient vécu avec lui (Jésus) ; ils s’affligeaient et pleuraient. » Mais on ajoute le triste refrain qu’on entendra à la suite des deux apparitions suivantes : ils refusent de croire le témoignage de Marie que le Christ est vivant.
L’allusion suivante aux deux disciples qui cheminent à « la campagne » condense le long récit de Luc 24,13-35, à propos des disciples qui se rendaient à Emmaüs. Encore ici, on signale le refus des autres de croire, à l’annonce de ces deux disciples.

Enfin ce condensé des apparitions rapporte celle du Ressuscité aux onze disciples, telle que la relatent les deux évangiles de Luc 24,36-42 et de Jean 20,19-23. Avec plus d’insistance, l’auteur souligne encore le refus des disciples de croire, que le Ressuscité lui-même déplore: « Il leur reprocha leur incrédulité et leur endurcissement, parce qu’ils n’avaient pas cru ceux qui l’avaient vu ressuscité. »

Ce refrain pénible sur le refus de croire exprime une préoccupation majeure de l’auteur qui a rédigé ce résumé des apparitions. Comment ne pas s’attrister de l’hésitation de chrétiens qui n’avaient pas la ferme conviction d’afficher leur foi pour remplir leur devoir d’évangélisateurs? Ils se butaient trop souvent au rejet ou à l’indifférence des gens à qui ils annonçaient la Bonne Nouvelle de la Lumière et de la Vie, mais qui préféraient le chemin des ténèbres et de la mort ?

Bienheureux ceux qui croiront sans avoir vu

Ce condensé des apparitions du Ressuscité se termine par la mission universelle confiée à ces témoins qui ont refusé de croire. Le Christ appelle des disciples hésitants et ignorants à le représenter pour une tâche surhumaine. Un petit groupe d’hommes peureux devront affronter l’humanité entière pour inviter tous les humains à s’engager sur l’unique voie du salut. Animés de la vive conviction que leur insufflera le Seigneur, ils transmettront la flamme reçue à tous ceux et celles qui l’accueilleront dans la foi.

Le Ressuscité produira des signes par ses témoins tout au long des siècles. Comme le Créateur associa l’être humain à son œuvre de vie à travers le temps et l’espace, le Seigneur Jésus appelle les siens à répandre sa propre vie, à coopérer à cette nouvelle création du monde. Dieu appelle toujours des médiateurs pour transmettre ses dons. On ne reçoit pas le don de la foi pour le conserver pour soi-même. Tout don reçu qu’on ne partage pas se perd. C’est en le partageant qu’il se développe et s’épanouit. Telle est la loi de l’amour : on ne possède bien que ce que l’on donne.

Jean-Louis D’Aragon SJ