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2023/06/03 – Mc 11, 27-33

Discerner le chemin du bonheur

Quel est le secret du bonheur? « Le plaisir, l’argent,… » répond le monde. Mais toutes ces frivolités sont superficielles, elles n’atteignent pas le coeur d’une personne humaine et disparaissent vite. Pour celui qui croit, la seule voie du bonheur consiste à découvrir la volonté de Dieu et à y conformer toute sa vie. Pourquoi? Parce que Dieu nous aime mieux que nous-mêmes et veut pour nous le vrai bonheur, celui qui nous comble de joie et qui dure sans fin.

Sa volonté, Dieu nous la manifeste par ses envoyés, les prophètes, et par les signes qu’il place sur notre route. Mais comment savoir si ces prophètes ou ces signes proviennent du Seigneur? Le discernement spirituel, guidé par des critères précis, nous permet de juger et de nous orienter. Au temps de Jésus, ceux qui remplissaient cette fonction essentielle de discerner la vraie route et d’y conduire le peuple, c’étaient les chefs des prêtres, les docteurs de la loi et les anciens.

Une provocation!

En chassant hors du temple les vendeurs et les changeurs de monnaie, le Christ a posé un geste révolutionnaire. Son intervention équivalait à une condamnation de la conduite des grands prêtres, qui possédaient l’autorité complète sur le temple et sur les activités qui s’y déroulaient. Ce geste audacieux rappelait la prophétie de Jérémie, annonçant la destruction de ce sanctuaire. En Raison de cette prophétie, on avait réclamé la mort du prophète. (Jér 7,12-15; 26,7-9) Maintenant, ce sont les chefs des prêtres, les scribes et les anciens – c’est-à-dire l’élite de la nation – qui interpellent Jésus pour qu’il explique de quel droit il est intervenu de façon aussi spectaculaire: « Comment as-tu osé? » Au procès de Jésus, son geste et son annonce de la destruction du temple seront au centre des accusations contre lui. (Mc 14,58)

Une question embarrassante

Jésus ne leur répond pas immédiatement, mais il commence par une question, à laquelle ses interlocuteurs ne peuvent, ou plutôt ne veulent pas répondre. Ils vont montrer ainsi qu’ils sont de mauvaise foi. Il serait donc vain que Jésus leur réponde, car leurs préjugés à son égard les empêcheraient d’accepter et de comprendre la vérité. À ceux qui n’ont pas les dispositions nécessaires pour accueillir la vérité, il est préférable de ne pas leur répondre. Jésus avait prévenu ses disciples: « Ne jetez pas vos perles devant les porcs, de peur qu’ils ne les piétinent. » (Mt 7,6)

Jésus, lui, s’était prononcé sur Jean et il avait fait son éloge après le départ des disciples que celui-ci lui avait envoyés: la foule s’était rassemblé auprès de Jean pour l’entendre et se soumettre au rite du baptême, car il était « bien plus qu’un prophète ». (Mt 11,9) Mais, comme tous les envoyés de Dieu, Jean dérangeait; Hérode l’avait violemment écarté pour le réduire au silence. Les grands prêtres et les docteurs de la loi ne l’avaient pas persécuté comme Hérode, mais ils étaient demeurés sourds à son appel à la conversion. Leur indifférence était une autre manière de se fermer les oreilles à la Parole de Dieu.

Une élite malhonnête

Jean était-il envoyé du Seigneur et son représentant, ou bien était-il un imposteur? En lui et dans son message, les scribes et les prêtres ont-ils vu Dieu et ont-ils entendu sa voix? À cette question essentielle, les chefs avaient le devoir d’éclairer le peuple. En avouant leur ignorance ou leur refus de se prononcer, ils se discréditent et ne méritent pas le respect du peuple. Ce jugement implicite condamne leurs prétentions d’assumer le rôle de dirigeants. Ce verdict prépare les vives controverses qui vont suivre, dans lesquelles Jésus va montrer qu’ils sont de mauvais pasteurs.

Pour entendre la Parole de Dieu, il faut être disponible à entendre un message nouveau, qui pourra déconcerter. Le Seigneur es t le Dieu de l’histoire, il n’est pas le Dieu de la stagnation, de la répétition, il nous entraîne en avant, vers la nouveauté à découvrir. Ses voies ne sont pas les nôtres et ses projets ne sont pas les nôtres. (Isaïe 55.8)

Jean-louis D’Aragon SJ

2023/06/02 – Mc 11, 11-25

Jésus vient d’entrer à Jérusalem, entouré de ses disciples et d’une foule qui l’acclament, « Que Dieu bénisse celui qui vient au nom du Seigneur!… » Mais Jésus ne se présente pas comme le peuple le souhaite, un chef guerrier, victorieux et libérateur des ennemis. Il monte un âne, la monture des pauvres, et non pas un cheval, marque du conquérant.

À Jérusalem, Jésus prévoit nettement qu’il devra affronter les autorités juives. Cet affrontement amorcera la crise décisive. Une parabole en acte, sous la forme du figuier sans fruits, illustre la stérilité du Judaïsme officiel, qu’il va juger par la purification du temple. Un enseignement sur l’efficacité de la prière conclut cette scène.

Jésus entre délibérément à Jérusalem

En arrivant dans la ville, Jésus se rend au temple, centre de la vie religieuse du peuple. « Il inspecte du regard toutes choses », évaluant lucidement les abus qu’il découvre, sans réagir immédiatement sous le coup d’une émotion subite. Il retourne à Béthanie pour la nuit et il prie pour que sa décision soit conforme à la volonté de Dieu. Il prie pour avoir le courage et la force d’affronter les autorités juives.

Les disciples jugent que la venue de Jésus au temple équivaut presque à un suicide, car il s’aventure sur le terrain où ses adversaires sont tout-puissants. Mais leur attachement au Christ est plus fort que leur peur; ils demeurent avec lui et le suivent.

Le figuier stérile

Un mois avant la saison des fruits, il est anormal de chercher des figues. Le figuier, au printemps, resplendit de feuilles, mais cette belle apparence ne cache aucun fruit. Pourquoi Jésus cherche-t-il ce que le figuier ne pouvait produire à cette époque? Manifestement ce n’est pas le figuier comme tel qui est important, mais la leçon que Jésus veut illustrer.

L’épisode du figuier se divise en deux moments, qui encadrent le jugement du Christ sur le culte qui se déroule dans le temple. La malédiction du figuier ne se comprend pas en elle-même, séparée de la purification du temple. Cet arbre a belle apparence, avec son feuillage, mais il n’a produit aucun fruit. Pour Jésus, le culte dans le temple se revêt de splendeur et de solennité, mais ne remplit pas sa fonction d’introduire les fidèles dans la communion à leur Seigneur.

Purification du Temple

Depuis le début de son ministère prophétique, Jésus a contesté l’enseignement des scribes et des pharisiens. Sa contestation atteint maintenant
le haut sacerdoce, les grands prêtres sadducéens, cette puissance qui veillait sur le temple et sur le déroulement de son culte. L’intervention de Jésus, qui condamne les activités dans le temple, équivaut à une censure des grands prêtres qui acceptent ce désordre et une telle exploitation des fidèles.

Reprenant une dénonciation du prophète Jérémie (7,11), Jésus accuse les autorités d’avoir dégradé le temple en « une caverne de bandits. » Quel abus Jésus dénonçait-il? Il semble que la puissante famille d’Anne, en particulier Caïphe, le grand prêtre au temps de Jésus, avait introduit dans le temple les commerçants, qui vendaient les animaux pour les sacrifices. Avant cette innovation, les commerçants se tenaient en dehors du sanctuaire.

Jouissant d’une sorte de monopole dans le temple, les commerçants, associés aux prêtres, auraient doublé le prix des animaux pour les sacrifices, en comparaison des prix ordinaires. C’est cette exploitation des fidèles que Jésus dénonce. Ce commerce éhonté et le vacarme profanaient la Maison de Dieu.

Jésus cite également le prophète Isaïe (56,7), qui rapporte le volonté du Seigneur sur le temple: « Ma maison sera une maison de prière pour toutes les nations. » Jésus dénonce évidemment les cris des commerçants et le beuglement des animaux qui empêchent toute véritable prière. Mais Jésus veut, comme le prophète, éliminer le mur de séparation, avec l’inscription qui prévenait les païens de la peine de mort s’ils pénétraient dans cette enceinte pour prier Dieu. Jésus rejette toute discrimination.

Efficacité de la prière

Au nom des disciples, Pierre s’étonne et admire la réalisation rapide de la parole de Jésus, « maudissant » le figuier. Jésus répond que la prière de toute personne peut, comme la sienne, obtenir le même résultat. Pour que notre prière soit vraiment efficace, il faut remplir deux conditions.

Tout d’abord, on doit se mettre en présence de Dieu pour connaître si vraiment nous osons lui demander la faveur que nous désirons. Est-ce seulement pour satisfaire notre égoïsme, en voulant inconsciemment mettre la puissance du Seigneur à notre service et la réduire à nos limites et à nos déviations? « Déplacer une montagne » pour une satisfaction magique, c’est la contradiction de la prière.

La seconde condition consiste à se conformer à la volonté de Dieu. Croire que l’amour de Dieu veut notre bonheur mieux que nous. Épouser le projet de Dieu sur nous consiste à élargir notre volonté et nos désirs aux dimensions du Seigneur. Dans la prière, il ne faut pas attendre de Dieu notre réponse, mais la sienne.

Mais la prière peut rencontrer un obstacle insurmontable: l’hostilité à l’égard d’un parent, d’un proche ou de n’importe quelle personne. Avoir de l’amertume, de la haine dans le coeur, se diviser ou s’opposer à autrui, c’est ériger un mur entre le Seigneur et nous. Il est impossible de communiquer avec Dieu, si on a érigé une muraille de haine quelle qu’elle soit, qui nous sépare de notre prochain et de Dieu.

Rappelons-nous la parabole des deux serviteurs. (Mt 18,21-35) Le premier doit une somme énorme à son maître, qui, par pitié, lui remet toute sa dette. Mais celui-ci, qui vient de tout recevoir gratuitement de son maître, ne veut pas partager cette gratuité avec son camarade. Il perd alors le pardon qu’il avait reçu. Par amour, Dieu fait les premiers pas vers nous, mais le don qu’il nous accorde, il faut qu’il rayonne autour de nous. On ne peut le garder pour soi-même.

Jean-Louis D’Aragon SJ

2023/06/01 – Mc 10, 46b-52

Jésus est en marche, montant vers Jérusalem, où il réalisera le coeur de l’histoire du salut, sa mort et sa résurrection. La ville de Jéricho, à plus de 400 mètres sous le niveau de la mer, se trouve à vingt kilomètres de Jérusalem, qui s’élève à 300 mètres au-dessus du niveau de la mer. La route qui mène de Jéricho à Jérusalem est sinueuse et nécessairement escarpée.
Le récit que nous présente Marc est clairement circonstancié, à la sortie de Jéricho, vers Jérusalem, mais l’évangéliste découvre dans ce miracle un signe d’une valeur universelle. Les détails de l’événement ont une signification pour tous les disciples de Jésus, à toutes les époques.

L’aveugle mendiant

Ce mendiant, prisonnier dans les ténèbres au bord de la route, représente notre misérable humanité, sans espoir. Comme lui, chaque être humain aspire à la lumière et à la vie. Cette lumière et le salut s’avancent devant l’aveugle dans la personne de Jésus, qui passe également devant nous dans des signes qui nous interpellent. Le Christ, fait route vers Jérusalem, où il va accomplir la libération de l’humanité, en changeant les ténèbres de la mort en la lumière éclatante de la résurrection.

L’aveugle crie « Au secours! », et appelle Jésus comme un désespéré: « Jésus, Fils de David », Messie, Roi idéal, descendant de David. C’est le même titre que la foule enthousiaste adressera à Jésus au moment de son entrée à Jérusalem pour saluer le Messie. Cet aveugle ressemble à l’homme qui se noie et qui implore qu’on lui jette une bouée de sauvetage. S’il hésite et attend, le salut passera et disparaîtra au loin comme un train.

Le monde autour de l’aveugle veut lui imposer le silence. Le monde déteste être dérangé dans sa fausse quiétude et tentera toujours de faire taire celui qui croit et espère. Mais, comme l’aveugle, il faut persévérer en dépit des reproches des gens qui préfèrent leurs ténèbres (Jean 3,19). L’aveugle sait par sa foi que celui qui peut lui rendre la vue est là, que le moment favorable est court, qu’il disparaîtra vite. Son cri, inspiré par une sorte de désespoir, vient du fond de son coeur. Le psalmiste a bien raison de nous dire qu’il faut profiter du salut qui passe: « Aujourd’hui, si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas votre coeur. » C’est le train du salut qui passe. Il faut saisir l’occasion de son passage.

L’aveugle guéri

La guérison physique est évidemment l’image de la guérison du coeur et de toute la personne de l’aveugle. Jésus répond à la demande de l’aveugle en lui disant non pas « Ta foi t’a guéri », mais « Ta foi t’a sauvé. » La guérison physique est le symbole du salut de sa personne, de la vie éternelle. Il voit et reconnaît en Jésus l’Envoyé de Dieu. Sa foi est active, car il ne se contente de se réjouir de la guérison obtenue, il « suit Jésus sur le chemin » vers Jérusalem, vers la croix et la résurrection.

Cet aveugle, qui gît comme un mendiant au bord du chemin, nous représente tous, nous qui essayons de cheminer dans l’obscurité. Nous sommes tous plus ou moins des aveugles. Notre guérison peut nous venir uniquement du Christ, l’Envoyé de Dieu, qui nous offre la lumière. Pour l’accueillir, nous devons croire avec persévérance, en dépit des sirènes et des sourires sceptiques qui tentent de nous distraire ou de nous décourager. Mais il ne suffit pas de croire tout simplement; notre foi doit être active et se réaliser dans la suite du Christ montant à Jérusalem.

Jean-Louis D’Aragon SJ

 

2023/05/31 – Lc 1, 39-56

Marie se rend rapidement chez sa cousine Elisabeth qui est enceinte. A son arrivée, celle-ci, sous l’influence de l’Esprit Saint prophétise et son enfant tressaille d’allégresse. Marie prononce son chant d’action de grâce, le Magnificat. Elle reste avec Elisabeth pendant trois mois.

Tout le récit de l’enfance dans Luc reflète le commencement du Règne de Dieu. Avec l’Incarnation de la Parole de Dieu, la présence de l’Esprit se fait sentir et les hymnes de louange et d’action de grâce sont remplis de joie.

Marie n’est pas le centre des récits même si elle est importante. Elle est le premier modèle d’un disciple. C’est son acceptation de la parole de Dieu qui a permis l’Incarnation et c’est ce que souligne Elisabeth: Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. (Luc 1,45)

Ensuite, son voyage rapide pour aller porter la Parole à Elisabeth est l’image du voyage que fera la Parole jusqu’à Rome (livre des Actes) et de la mission de tout vrai disciple. La virginité de Marie, qui est clairement impliquée, n’est pas pour glorifier la mère mais bien pour donner le sens de l’enfant qu’elle porte. Il reste qu’à cause de cela, elle est bénie entre toutes les femmes (Luc 1,42): elle porte la parole par excellence, le Verbe de Dieu.

A la suite de sa réponse de foi, l’Esprit est venu sur elle et l’accompagne. C’est lui qui fait tressaillir l’enfant dans le sein d’Elisabeth et la fait prophétiser: elle proclame que le fils de Marie est le Christ Seigneur celui que le Psaume 110 appelle le descendant de David, Seigneur, et que Jésus citera plus tard (Luc 20,41).

Marie dit le Magnificat, son chant d’action de grâce et de louange. Tout en reconnaissant que Dieu s’est penché sur son humble servante et que pour cette raison elle sera déclarée bienheureuse, son chant est surtout une louange de Dieu, dans des phrases commençant par “Il” et qui sont des réminiscences des louanges de l’Ancien Testament.

Jean Gobeil SJ

 

 

2023/05/30 – Mc 10, 28-31

Pierre déclare à Jésus: Voilà que nous avons tout quitté pour te suivre. C’est une sorte de question. Jésus répond: Qui aura quitté des parents, une maison ou une terre recevra dès maintenant au centuple parents, terre, maison et des persécutions et dans le monde à venir la vie éternelle. Beaucoup de premiers seront les derniers et les derniers seront les premiers.

Ce texte est à relier à ce qui précède. Jésus a offert à un jeune homme riche de le suivre à condition de se dégager de ses richesses. Le jeune homme, incapable de faire cette séparation, s’en est allé tout triste. Jésus, alors, a déclaré qu’il était plus facile à un chameau de passer à travers le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu. C’est une façon imagée (et peut-être humoristique) de dire que c’était impossible. Les disciples sont consternés et demandent qui sera alors sauvé. Jésus répond que ce qui est impossible aux hommes est possible à Dieu. Dieu seul peut sauver, répètera Paul. Et pour suivre Jésus,.il faut le suivre, lui: car on ne peut le suivre en restant attaché à un autre maître, a déclaré Jésus. Il a illustré cela de différentes façons.

Le premier appel des disciples a été: Viens et suis-moi. Pour le suivre dans ses missions en Galilée comme Jacques et Jean, ils ont dû abandonner bateau, filets et père (Marc 1,9).Ensuite, quand il les a envoyés en mission, il leur a défendu de compter sur des sécurités matérielles (Marc 6,8). Ils doivent être détachés et libres pour être au service d’un seul Maître.

Tous ces exemples servent de rappel aux premiers chrétiens comme les lecteurs de Marc. La conversion, pour eux, a parfois sinon souvent, exigé des ruptures avec le clan ou la famille. Par contraste avec le jeune homme riche qui n’a pu faire une telle séparation Pierre pose la question: Et nous, qui avons tout quitté pour te suivre, qu’est-ce qu’on a? A-t-il quitté réellement tant que cela? Nous y reviendrons mais Jésus répond quand même.

Sa réponse veut attirer l’attention de Pierre sur ce qu’il a reçu. Ils ont parents, maison, terre au centuple…Des images qui montrent qu’ils ont reçu un amour que Dieu seul peut donner et qu’il déborde les anciennes limites. Il peut demander une rupture mais la loi de l’amour du prochain n’est pas disparue. Et, par ailleurs, il peut demander une rupture mais une exclusion n’est pas toujours nécessaire, comme on peut le voir avec Pierre.

Jésus a demandé à Pierre de le suivre mais ne lui a pas demandé de vendre son bateau puisqu’après la résurrection Pierre y est revenu pour aller pêcher. Et c’est en revenant de la pêche qu’il a vu quelqu’un qui l’attendait sur la rive. Il finit par reconnaître le Seigneur qui lui demanda d’apporter quelques-uns de ses poissons. Bien sûr, pour le suivre, Pierre avait abandonné sa maison à Capharnaüm, et sa belle-mère… mais son épouse? Il semble bien que, du temps de Paul, elle l’accompagnait dans ses missions, puisque ce dernier dit aux Corinthiens:

N’avons-nous pas le droit d’emmener avec nous une femme chrétienne, comme les autres apôtres, et les frères du Seigneur et Céphas (Pierre)? (1 Cor,9,5)

Mais, pour Pierre, elle n’enlevait certainement pas la première place à Jésus.

Jean Gobeil SJ

2023/05/29 – Mc 10, 17-27

On pourrait appeler notre texte “l’histoire d’une vocation”. Un homme vient à Jésus et l’empêche de partir. Il s’agenouille devant lui ce qui est un signe d’une vénération bien spéciale et lui dit : “Bon Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle?”

Jésus lui fait la remarque qu’il n’y a que Dieu qui est bon. C’est peut-être pour lui rappeler que “les choses à faire” ne sont rien en elles-mêmes: elles n’ont d’importance que dans leur relation à Dieu.

Jésus lui cite alors la partie du décalogue qui concerne les devoirs vis-à-vis du prochain en ajoutant le résumé: “ne fais de tort à personne”.

L’homme répond qu’il a toujours fait cela. Il est donc un bon Juif, religieux et fidèle à observer les commandements de Dieu.

“Alors Jésus le regarda et se mit à l’aimer.”

Comme dans l’Alliance avec Israël, l’amour de Dieu a toujours précédé sa parole et son action de salut. Il a évidemment précédé la réponse d’Israël. Ici, l’amour de Jésus précède l’appel qu’il va faire: “Viens et suis-moi.”

Cet appel n’est pas fait à tout le monde mais bien à un particulier. C’est le même appel qui a été fait à Simon et André qui ont aussitôt laissé leurs filets, de même pour Jacques et Jean qui ont quitté leur père et leur barque. Ici, son appel est très exigeant mais cette exigeance sera retenue dans l’Eglise primitive: le partage des biens au service des pauvres de la communauté sera considéré comme quelque chose d’essentiel.

On découvre après l’appel de Jésus que cet homme était très riche. Les richesses ne sont pas présentées comme une mauvaise chose ou comme une faute mais elles empêchent cet homme de répondre à l’appel: il n’est pas libre à cause d’elles.

Le sens global du récit n’est pas l’abandon des richesses mais plutôt l’attachement à Jésus qui doit être primordial. L’homme était un bon Juif, fidèle à observer le décalogue et qui n’avait rien fait de mal. Mais Jésus demande plus, un dépassement pour s’attacher à lui-même.

L’attachement aux richesses sont pour Jésus un obstacle insurmontable pour les seules ressources humaines. Mais pour Dieu, déclare Jésus, il n’y a rien d’impossible. Dieu peut pourvoir à la libération qui permettra le don total au Christ.

Jean Gobeil SJ 

2023/05/27 – Jn 21, 20-25

Illusion humaine !

La comparaison entre Pierre et le disciple bien-aimé revient de nouveau à propos de leur avenir. Le désir de connaître l’avenir a toujours préoccupé les humains depuis le début de l’histoire. Même le patriarche Joseph, en Égypte, pratiquait la divination avec de l’eau sur laquelle on versait quelques gouttes d’huile. La forme des gouttes d’huile sur l’eau permettait de présager l’avenir (Gen 44,5).

Il est vrai que le disciple bien-aimé ne sera pas martyr à la manière de Jésus et de Pierre, mais il témoignera à sa manière, d’une façon permanente par son Évangile (21, 24). Chacun(e) doit être un témoin du Seigneur Jésus, à sa manière avec ses talents, selon la vocation reçue de Dieu.

L’auteur de ce chapitre, au nom de sa communauté, corrige avec insistance une fausse interprétation d’une parole de Jésus. Plusieurs fidèles entretenaient l’espoir que le Seigneur reviendrait bientôt d’une manière glorieuse et définitive, au moins avant que disparaisse la première génération chrétienne, celle des témoins qui avaient connu Jésus. Ceux-ci en effet établissaient un lien direct et vivant entre les croyants de la fin du 1er siècle et le Christ Jésus. La disparition de celui qu’ils considéraient comme le plus éminent témoin de cette génération perturba, semble-t-il, les membres de l’Église johannique. Cette espérance du retour du Seigneur s’appuyait sur la promesse de Jésus, dans son discours d’adieu : « Après être allé vous préparer une place, je reviendrai et je vous prendrai auprès de moi » (14, 3). Mais quand reviendra-t-il et de quelle manière ? Jésus ne le précise pas, car l’avenir est objet de foi et de confiance, mais non pas de planification humaine.

Une source inépuisable !

Une nouvelle conclusion de l’Évangile (21, 25) s’inspire de la précédente (20, 30s). Elle y ajoute toutefois l’idée que le mystère du Seigneur Jésus déborde toutes les interprétations, car sa richesse est inépuisable. Tous les ouvrages de la tradition chrétienne développeront et adapteront cette révélation divine que rapportent les évangiles et l’ensemble de la Bible. Mais l’immense et riche tradition à travers les siècles n’ajoute aucun élément strictement nouveau au cœur de la révélation de Dieu, elle a pour fonction d’en développer la richesse et de l’adapter aux nouvelles circonstances de l’histoire. En effet, Dieu le Père a tout donné dans son Fils incarné, dans le mystère de son triomphe de la vie sur la mort.

Jean-Louis D’Aragon SJ

2023/05/26 – Jn 21, 15-19

Le vrai pasteur du Christ

Jésus pose trois fois à Pierre la même question, « M’aimes-tu ? », qui rappelle le triple reniement, puisque Pierre devient triste à la troisième interrogation de son Seigneur. Pierre rachète sa triple défaillance par sa triple profession d’amour et de fidélité.

Mais l’accent dans ces questions porte surtout sur le lien étroit entre l’autorité conférée à Pierre dans la communauté – « pais mes brebis » – et l’amour du Seigneur – « m’aimes-tu ? ». Jésus reprend l’image séculaire du pasteur, dont l’autorité sur les brebis consiste à les conduire, à les nourrir, à les protéger et à les amener ensemble dans l’unique bercail.

Pour exercer l’autorité, Pierre, qui représente tous ceux qui recevront du Seigneur un mandat d’autorité dans la communauté, doit avoir en lui l’amour du Christ, qui rayonnera sur les brebis. Sans amour, au¬cune auto¬rité, quelle qu’elle soit, ne peut produire des fruits.

Cette autorité ne se limite pas à celle qui se concentre dans un titre, évêque, prêtre, parent,… Elle s’applique à toute personne qui a reçu de Dieu une valeur qu’elle a le devoir de communiquer : la vie biologique et spirituelle, l’éducation,… Nous avons tous reçu de notre Créateur des dons que nous n’avons pas le droit de conserver pour nous-mêmes. Pour les communiquer, il faut avoir en nous l’amour de Dieu. L’efficacité de toute communication se mesure avant tout à l’amour que l’on ressent à l’égard de la personne à qui on s’adresse.

Fidélité à la suite du Christ

Cet amour du Seigneur se manifeste dans la fidélité à suivre le Christ, chacun selon la vocation qu’il a reçue. Celle de Pierre consistera à « étendre les mains » comme son Maître. Les trois expressions, « étendre les mains », « nouer la ceinture », « être conduit là où on ne voudrait pas » décrivent la crucifixion. Comme tout chrétien, Pierre rendra vivante en lui la figure du Christ par son « martyre », son « témoignage », car tel est le sens du mot « martyre » en grec. Cette prophétie de Jésus est la mention la plus ancienne du martyre de Pierre, probablement à Rome, vers l’année 67.

Le genre d’exécution que subira Pierre sera le même que celui de Jésus. Aussi l’interprétation semblable de cette mort, qui « glorifiera Dieu », repa¬raît ici pour Pierre, comme pour Jésus, qui avait expliqué que son élévation de terre, sur la croix, procurerait la gloire de son Père.

Comment la mort de Jésus, celle de Pierre et de tout chrétien peut-elle procurer la gloire de Dieu? L’offrande de sa vie à Dieu dans l’abandon confiant de soi-même dans la foi constitue la preuve extrême de l’amour. Cette ouverture du coeur à Dieu lui permet de se rendre présent et d’apparaître dans celui qui lui a tout donné.

La relation d’amour mutuel, devenue parfaite dans le don total, produit l’union intime du Père et du Fils, qui habitent l’un dans l’autre, et qui, de même, vivent dans une habitation mutuelle en chaque croyant.

Jean-Louis D’Aragon SJ

2023/05/25 – Jn 17, 20-26

L’unité des croyants dans le Père et le Fils

Jésus avait déjà demandé l’unité pour ses disciples (17,11). Il insiste maintenant en explicitant le motif de cette supplique : Pour que le monde croie que tu m’as envoyé (v.20); pour que le monde connaisse que tu m’as envoyé (v.23). Le but de l’unité consiste donc de permettre à l’Église de réaliser sa mission : amener le monde à croire que le Père est présent dans le Fils, ce qui est le coeur de la foi.

Et pourquoi le monde croira-t-il ? Parce qu’un groupe aussi uni que la communauté chrétienne ne pourra exister sans l’intervention de Dieu, unique source d’amour, de vie et d’unité. Bien plus, l’union intime entre les chrétiens rendra comme sensible au monde le mystère d’amour et de communion mutuelle du Père et du Fils.

L’unité des croyants est produite par une seule cause : leur amour réciproque, manifes¬tation authentique de la même vie qui les anime. Et cet amour, le seul véritable, ne peut exis¬ter qu’en vertu de l’amour du Christ pour eux, amour qui a pour source ultime l’amour du Père pour son Fils : Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. (15,9)

L’unité chrétienne découle essentiellement de l’adhésion de tous les membres au Christ, de l’insertion de toutes les branches dans la vraie vigne. Les liens qui rattachent les fidèles à leur Seigneur se ramènent aux relations de foi et de connaissance, d’amour et d’obéissance, procurant l’existence mutuelle dans le Père et dans le Fils, en union avec tous les croyants. Cette habitation mutuelle – moi en eux et toi en moi (17,23) – est l’expression la plus profonde du mystère de l’unité.

Unis au Père par le Fils

En conséquence de l’union des croyants dans le Christ et de celle du Fils avec le Père, les fidèles sont unis au Père par la médiation de Jésus. Les relations réciproques exprimant l’unité du Christ et des siens, ainsi que celles du Christ et de son Père se retrouvent entre le Père et les chrétiens. Le Père a discerné les disciples et les a donnés à son Fils. Il les aime comme son Fils : Tu les as aimés comme tu m’as aimé. (17,23) Et cet amour se répand en libéralité : don de l’Esprit, du vrai pain du ciel, de la vie éternelle en son Fils. Enfin le Père demeure d’une manière per¬manente en celui qui aime son Fils (14,23).

Les disciples, de leur côté, entretiennent les mêmes relations à l’égard du Père. Ils le connaissent (14,7), ils l’aiment (1 Jn 4,10.19-21 ; 5,1s) et ils manifestent leur amour dans l’obéissance à ses commandements, en particulier au commandement de croire en son Fils et de s’aimer les uns les autres. Enfin ils demeurent en lui. Nous sommes dans le véritable Dieu en son Fils Jésus Christ. (1 Jn 5,20) Telle est donc la perfection de l’unité : tous les croyants rassemblés par le Christ en lui-même, qui les unit au Père : Moi en eux et toi en moi, pour qu’ils soient parfaitement un. (17,23)

Unis dans la gloire avec leur Seigneur

La prière de Jésus se termine sur une vision de l’au-delà, dans la gloire, dans l’amour et dans l’unité. Parvenus au terme de leur pèlerinage terrestre dans la foi, les disciples jouiront d’une participation définitive à la gloire de la vie divine en vertu de la communion à leur Seigneur.

La réponse du Père à l’ouverture dans l’obéissance de son Fils se manifeste dans le don. Le verbe donner, qui reparaît quinze fois dans cette prière, exprime l’amour effectif du Père pour son Fils et l’amour du Fils pour ses disciples. Le Père a donné à son Fils l’oeuvre à accomplir, c’est-à-dire l’ensemble de l’histoire du salut. Cette oeuvre comprend le nom du Père que Jésus révèle, les paroles du Fils, tous les disciples qui croiront au Christ, la gloire que le Fils recevra et qu’il communiquera à ses disciples.

L’histoire dynamisée par l’amour

Au moment où Jésus prononce cette prière, il se trouve avec ses disciples pour leur léguer son testament. Mais il apparaît également comme ayant déjà quitté le monde: Je ne suis plus dans le monde (17,11). Il est glorifié dans son union à son Père, exalté à sa droite. Lien vivant entre le Père et ses disciples dans le monde, Jésus est le grand prêtre parfait.

À ce tableau de l’au-delà éternel, Jésus rattache l’ensemble de l’histoire : le Père lui a manifesté son amour avant la création du monde. (17,24) L’union de Jésus et de son Père se réalise par l’amour. Or c’est cet amour du Père pour son Fils qui donne la plénitude de sens à toute l’histoire humaine dans laquelle le Verbe s’est incarné. En effet, l’objectif central de cet amour du Père pour le monde est de donner la vie éternelle à tous ceux qui croient en son Fils devenu homme (3,16). Ainsi l’amour du Père se manifeste sans cesse depuis le début de la création jusqu’au terme de l’histoire humaine. L’amour de Dieu enserre donc et anime toute la marche de l’humanité.

Découverte dans l’émerveillement

Cette connaissance du Père par son Fils n’est pas donnée en un instant; une telle ex¬périence se réalise suivant les possibilités humaines, en progrès constant dans le temps. En fait, une telle connaissance ne sera jamais complétée, définitive. Son progrès implique une découverte, un émerveillement et une action de grâce continuelle, qui constitue le bonheur du croyant. Le Seigneur glorifié promet aux siens qu’il leur communiquera cette connaissance sans fin du nom du Père. Il s’est engagé auparavant à leur envoyer le Paraclet, l’Esprit saint, qui leur enseignera toutes choses (14,26) et qui les fera accéder à la vérité tout entière (16,13).

Or le coeur de cette révélation continuelle est l’amour de Dieu pour son Fils à qui les croyants s’identifient. Cet amour du Père vivifiera l’âme de chaque chrétien et sera la force vitale qui régira les rapports entre les croyants et qui réalisera leur unité. C’est seulement à cette condition que le Seigneur Jésus, incarnation de l’amour de Dieu (1 Jn 4,10), sera vivant en eux et parmi eux, dans l’Église.

Conclusion: le chrétien interpellé

Le début de cette prière pourrait donner l’impression que Jésus prie seulement pour lui-même. En effet, il considère d’abord son union intime avec son Père dans une glorifica¬tion mutuelle (17,1-2.4-5). Mais il indique bien vite que cette glorification englobe tous ceux que le Père lui a donnés, afin qu’il leur communique la vie éternelle (17, 2-3).

Sa relation avec le Père d’ailleurs doit servir d’idéal pour les chrétiens dans leur union au Christ. La nature des croyants consiste à reproduire les mêmes caractéristiques qui déterminent l’union du Fils à son Père. C’est pourquoi les chrétiens seront séparés du monde (17, 6.14.16), comme Jésus qui n’appartient pas au monde. (17, 16) Mais ils continueront dans le monde à approfondir leur foi, afin de prolonger dans l’histoire la mission de leur Seigneur (17, 18).

Leur unité engagera le monde à croire au Père présent dans son Fils qu’il a envoyé (17, 21.23). Cette unité sera le résultat de l’amour de Dieu, qui, par le Christ, sera en chacun d’eux et qui rendra possibles leurs relations de mutuelle affection (17, 26). Envoyés par le Fils glorifié, ils seront les témoins de l’amour du Père, qui, seul, peut donner une pleine significa¬tion et une espérance sans limites à l’histoire humaine.

Jean-Louis D’Aragon SJ

2023/05/24 – Jn 17, 11b-19

C’est la deuxième partie de la prière de Jésus pour l’unité. Jésus prie pour ses disciples. Jésus leur a fait le don de la parole du Père. Il demande pour eux la fidélité qui les gardera dans l’unité avec le Père, la même unité que celle qui est entre le Fils et le Père. Il demande finalement au Père de les consacrer dans la vérité, c’est-à-dire de les rendre saints.

La première partie du chapitre 17 qu’on appelle la prière pour l’unité portait surtout sur le mot gloire ou glorification. La “gloire” de Dieu dans l’Ancien Testament est ce qui manifeste quelque chose de la grandeur ou de la présence de Dieu. Le Christ dans cette partie repasse sa vie devant le Père. Il parle d’ailleurs comme si tout était terminé.
Je t’ai glorifié (i.e. manifesté) en faisant connaître ton nom (i.e. la personne du Père).

Pour continuer cette glorification, il demande à Dieu de le glorifier, ce qui sera réalisé lorsque Dieu manifestera sa puissance sur la mort en le ressuscitant. Il sera aussi glorifié par ceux à qui il a fait connaître les paroles du Père et qui l’ont accepté.

La seconde partie de cette prière est ce que nous avons ici. On parle de la sainteté du Père et de la sainteté future des disciples.

Jésus commence par une adresse qu’on ne retrouve pas ailleurs : Père saint.

Dans l’ancien Testament, ce qualificatif est souvent attribué à Dieu sous la forme du Saint d’Israël. Saint veut d’abord dire complètement séparé, complètement différent de la sphère du profane. Parler de la sainteté de Dieu, c’est parler de sa transcendance. Il est le tout-autre et ne peut être confondu avec la création même si elle est très bonne. La meilleure vision et en même temps la meilleure révélation de la sainteté de Dieu se trouve dans la vision d’Isaïe au chapitre 6.

Cette vision survient au moment où Israël regrette la mort du roi Ozias qui a été un bon roi pour Israël. La vision va révéler à Isaïe qui est le vrai roi d’Israël et sera le point de départ de la vocation d’Isaïe dont toute la vie sera mêlée à la politique pour rappeler à Israël que Yahvé est leur roi et qu’il passe avant tout.

L’année de la mort du roi Ozias, je vis le Seigneur assis sur un trône grandiose et surélevé. Sa traîne emplissait le sanctuaire. Des séraphins se tenaient au-dessus de lui, ayant chacun six ailes, deux pour se couvrir la face (par peur de voir Yahvé), deux pour se couvrir les pieds, deux pour voler. Ils se criaient l’un à l’autre ces paroles: Saint, saint, saint (un superlatif) est Yahvé Sabaot (des armées célestes), sa gloire emplit toute la terre.

Les montants des portes vibrèrent au bruit de ces cris et le Temple était plein de fumée (signe de la présence de Yahvé au Sinì et dans la tente de la rencontre).

Alors je dis: Malheur à moi, je suis perdu! Car je suis un homme aux lèvres impures, j’habite au sein d’un peuple aux lèvres impures, et mes yeux ont vu le Roi, Yahvé Sabaot (des armées célestes).

C’est une vision de perfection, de grandeur, de transcendance. Isaïe est conscient d’un autre monde où on n’a pas le droit d’être, d’où la frayeur. Un ange va purifier sa bouche, c’est-à-dire le rendre capable de transmettre les paroles de Dieu.

Alors j’entendis la voix du Seigneur qui disait: Qui enverrai-je? Qui ira pour nous ? Et je dis: Me voici, envoie-moi.

Ce me voici est aussi la réponse d’Abraham, la réponse de Samuel et la réponse de Marie: il représente l’engagement de toute la personne. Isaïe a eu la vision de la sainteté et de la perfection de Dieu mais il a eu aussi la révélation que Dieu veut communiquer sa sainteté. C’est ce qui lui permet de répondre à l’appel de Dieu.

Quand le Christ s’adresse à Dieu en disant Père saint, il emploie deux mots qui représentent des contraires: saint représente la distance infranchissable de la transcendance de Dieu, et Père représente la proximité, l’intimité, l’immanence. Dieu qui est saint veut être notre Père et nous communiquer sa sainteté.

Dieu, qui est saint et à ne pas confondre avec nul autre, veut se communiquer; il veut communiquer sa sainteté à nous aussi.

Jean Gobeil SJ