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(Français) 2023/01/31 – Mc 5, 21-43

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Au bord du lac, une foule s’est assemblée autour de Jésus. Un chef de synagogue nommé Jaïre vient supplier Jésus de venir imposer les mains à sa petite fille qui est entre la vie et la mort. Jésus part aussitôt avec lui. Une femme qui souffrait d’une maladie incurable veut toucher le vêtement de Jésus pour être guérie.  Jésus se rend compte qu’une force est sortie de lui et demande qui dans la foule l’a touché. Les disciples lui font remarquer que la foule le presse de tous côtés. La femme guérie se jette à ses pieds. Jésus lui dit : « Ta foi t’a sauvée. Va en paix. » On annonce la mort de la petite fille. Jésus rassure le père en lui disant de croire. Arrivé à la maison, il fait sortir tout le monde et, avec le père et le mère et aussi quelques disciples (Pierre, Jacques et Jean), il va où est l’enfant, la prend par la main et la fait se lever en lui disant: Thalita koum..  Les gens sont bouleversés mais Jésus recommande le silence, puis il suggère de faire manger la petite fille.

C’est un texte rempli de détails. Ce sont les souvenirs d’un témoin oculaire comme le nom du chef de synagogue et la parole de Jésus en araméen. Mais ce sont les souvenirs d’un conteur qui relate à mesure que ces souvenirs reviennent, donc pas nécessairement en ordre, comme l’âge de la petite fille qui nous est dit quand tout est fini! Ce sont des souvenirs qui ne sont pas retouchés ou édités, comme l’ignorance de Jésus sur qui l’a touché, une ignorance qui embarrassera Matthieu et Luc, de même que la remarque fort cavalière des disciples: « Comment peux-tu demander cela quand tout le monde te presse? »

Ce récit est pourtant dans la ligne de la présentation de Jésus par Marc : il est celui que Jean Baptiste annonçait comme plus puissant que lui ; il avait reçu l’Esprit et affrontait les esprits mauvais qui devaient lui obéir. Il affrontait aussi les différentes forces du mal comme la lèpre et les maladies. Les deux femmes ici représentent des cas très graves. L’une a une maladie incurable : les médecins ne peuvent rien faire. En outre, comme il s’agit d’une perte de sang, elle est rituellement impure et ne doit toucher personne. L’autre finalement est considérée comme morte: les gens ont commencé les lamentations funèbres. Il suffit d’une parole de Jésus pour la ramener à la vie. Et pour la première, il a suffi qu’elle touche au vêtement de Jésus. Le Messie puissant est à l’oeuvre.

Mais les deux cas illustrent bien la démarche de la foi. Le père demande à Jésus de venir pour que sa petite fille soit sauvée.  La femme pense : Si je parviens à toucher son vêtement, je serai sauvée.  Et Jésus lui dit : Ta foi t’a sauvée. Ce sont donc deux beaux exemples de foi. La réponse de Jésus est irrésistible : avec le père, il se met tout de suite en route pour aller chez lui. Au toucher de la femme, la rencontre dans la foi se fait immédiatement: elle est guérie non seulement de sa maladie mais aussi de l’impureté rituelle qui l’isolait des autres.

Finalement, en dessous des mots, il semble y avoir une marque de tendresse dans la façon de Jésus de parler de la petite fille. Les serviteurs de Jaïre lui disent : Ta fille. Jaïre, lui, parle de sa petite-fille.  Le narrateur, lui, parle de l’enfant. Mais pour la parole de Jésus en araméen, Marc emploie une sorte de diminutif (au neutre !) qu’on pourrait peut-être traduire par ma-toute-petite. Quand tout est terminé, Jésus, lui, continue d’être intéressé par la petite fille et recommande qu’on lui donne à manger. Il y a certainement une touche de familiarité et même de tendresse de la part de Jésus pour cette petite fille.

 Jean Gobeil SJ 

 

(Français) 2023/01/30- Mc 5, 1-20

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Pour ce lundi, le long passage proposé à notre réflexion décrit une scène  spectaculaire. L’événement se produit en terre païenne : dans la Décapole ou « au pays des Géraséniens ».  Le malade qui bénéficiera du pouvoir de Jésus est un fou furieux, que personne ne pouvait  maîtriser et qui hantait les tombeaux et les montagnes, se déchirant avec des pierres et poussant des cris affreux. Il semble donc que les humains aient abandonné ce forcené, l’estimant irrécupérable parce que son mal était sans remède : impossible aux simples mortels d’arracher cet individu à la foule de démons qui avaient élu domicile en lui.

Ce cas désespéré permettra une démonstration de l’étendue de la puissance de Jésus. Le possédé reconnaît cette puissance car, cette sorte d’Hercule détraqué se précipite vers Jésus, non pas pour l’attaquer et  le mettre en pièces  mais pour se prosterner devant lui. On s’attendrait à ce qu’il demande la guérison, comme c’est toujours le cas quand un malade rencontre Jésus, mais en fait, ce cinglé n’a même plus la faculté de la parole indépendante. Ce sont les démons qui parlent par sa bouche, le réduisant au rang d’un simple  instrument. Ils demandent à Jésus de les laisser tranquilles, mais c’est bien évident qu’il n’accèdera pas à cette requête en abandonnant le pauvre homme à leur empire.

La confrontation inévitable prend des allures étranges. Jésus intime aux démons de sortir de cet homme. En fait, il semblerait qu’ils aient un porte-parole qui en leur nom, engage la négociation avec Jésus. C’est lui qui supplie, (ne me tourmentes pas), qui révèle qu’ils sont « Légion », et qui insiste pour ne pas être envoyé hors du pays. Surprenante demande qui suggère que ces démons sont sédentaires ou qu’ils ne parviendraient pas à opérer en terre sainte, car, « hors du pays » signifie probablement « en terre d’Israël ». Et c’est ce porte parole qui finit par trouver une solution : « Envoie-nous dans les porcs pour que noue entrions en eux. » Il le leur permit, et le troupeau de porcs se précipita de la falaise dans la mer. Il y en avait environ deux mille.

Les porcs sont impurs. Comme les démons. On ne devrait donc pas regretter leur noyade, métaphore de  la domination irrésistible du Fils de Dieu. Mais en fait, tout ne finit pas bien! L’homme délivré des démons n’obtient pas le privilège de suivre Jésus. Ceux qui ont assisté à la scène du naufrage des porcs sont saisis de panique : ils s’enfuient, répandent la nouvelle, et à leur tour, ceux qui entendent leur récit sont saisis de crainte. Ils demandent à Jésus de s’éloigner de leur territoire. Mais pourquoi le supplient-ils de s’en aller? On pourrait avancer l’explication suivante.

L’acte de puissance que Jésus vient de poser signifie qu’il concentre en lui l’aspect redoutable du sacré : le tremendum.  Cet aspect du sacré est dangereux et l’on doit s’en protéger, même et surtout parce qu’il est attirant, un peu comme un feu  nocturne en plein air : les flammes captivent les insectes qui finissent par s’y brûler les ailes et tomber dans le brasier. Et si le texte n’était pas plus proche d’un conte fantastique que d’un reportage, il y aurait un autre argument pour souhaiter que le guérisseur de Nazareth retourne chez lui au plus vite : sa propre sécurité! Car, précipiter deux mille porcs dans la mer, c’est provoquer un désastre économique. Pour les gens de la Décapole, un porc n’est pas impur : c’est de la nourriture. Même de nos jours, un entrepreneur chrétien dont on provoquerait la banqueroute de cette manière réagirait violemment : il tuerait Jésus ou le poursuivrait pour dommages et intérêts.

Jean Gobeil SJ 

(Français) 2022/02/05 – Mc 6, 30-34

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La scène que présente l’Évangile d’aujourd’hui nous montre en particulier l’humanité de Jésus. Il a vraiment pris notre condition humaine, avec ses limites, mais aussi avec ses émotions et son empathie pour ses disciples et pour la foule qui le suit.

Les disciples qui rassemblent autour de Jésus ressemblent à des enfants qui reviennent à la maison, le soir, et qui racontent à leurs parents ce qu’ils ont vécu durant la journée. Leur Maître les avait envoyés en mission, deux par deux, démunis de ressources matérielles pour prolonger le ministère de Jésus et montrer par anticipation comment les chrétiens doivent continuer la mission du Christ. Leur seule force consistait dans leurs convictions personnelles et leur zèle de communiquer l’Évangile de la vérité et de la vie. Pour cette mission, Jésus leur avait “donné pouvoir de soumettre les esprits mauvais” (Mc 6, 7), de faire reculer le mal.

Les disciples reviennent auprès de Jésus, heureux d’avoir rempli la tâche qu’il leur avait confiée, mais épuisés par le travail. Ignorant leur fatigue, les gens s’attroupent autour de Jésus et de ses disciples. Le Maître constate que ses disciples sont fatigués et qu’ils ont besoin de repos. Il veut les amener à l’écart dans “un endroit tranquille.”

Jésus nous montre par cette décision que toute personne humaine doit établir un équilibre dans son existence, entre son travail et ses moments de détente. Concentrer toutes ses énergies dans une seule dimension de son être aboutit à la faillite de sa vie, parfois même à la folie. Sans aller jusqu’à l’extrême, combien de gens consacrent tout leur temps et toutes leurs énergies à leur réussite professionnelle, mais délaissent leur devoir envers leur famille.

Il arrive pourtant des circonstances exceptionnelles qui nous obligent à déroger à ces règles de notre programme de vie. Ces exceptions font appel à notre charité, la vertu suprême que Jésus nous a enseignée. Lui-même oublie son projet d’amener ses disciples à l’écart pour qu’ils se reposent. La foule, fascinée par son enseignement et par les guérisons qu’il opère, accourt et prévient même sa venue. À l’opposé des philosophes stoïciens de son temps qui réprouvaient la pitié comme une faiblesse, Jésus s’émeut face à ces gens désespérés, sans berger pour les guider et leur procurer la sécurité. Il leur consacre donc tout son temps, “ils les instruit longuement.” L’amour nous entraîne à tout laisser pour répondre à un besoin urgent. Le pauvre qui tend la main, c’est Jésus lui-même: “J’étais nu et tu m’as habillé.” (Mt 25, 36)

Jean-Louis D’Aragon SJ

(Français) 2022/02/04 – Mc 6, 14-29

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À la mort de grands personnages, on peut avoir l’impression qu’ils ont disparu, mais c’est une erreur, car le mouvement qu’ils ont lancé continue d’influencer l’histoire, telle une vague qui se perd au loin. L’appel à la conversion de Jean le Baptiste avait attiré des foules au baptême de pénitence qu’il pratiquait au Jourdain. Même après son exécution par le roi Hérode, le peuple pensait qu’il revivait en Jésus, qui proclamait le même message que Jean: se détourner de tout ce qui s’oppose à l’accueil du Royaume de Dieu. Le peuple, et même Hérode, associait donc étroitement Jean et Jésus, au point de croire que le premier revivait dans le second. De fait, non seulement leur prédication était semblable, mais la destinée de l’un et de l’autre sera semblable: ils offriront leur vie par fidélité à leur vocation, ils témoigneront jusqu’au bout de la vérité et de la justice divine.

À l’opposé de ces envoyés de Dieu, trois personnages vils, ambitieux et cruels incarnent ici l’injustice et le mal. Aucun crime ne leur répugne pour satisfaire leur orgueil et leur égoïsme. Lorsqu’il avait visité Rome, Hérode avait séduit l’épouse de son frère Philippe. Ambitieuse, Hérodiade avait ainsi accédé à la royauté, mais elle ne pouvait pas jouir librement de son élévation, car la dénonciation de Jean rappelait sans cesse son adultère à la conscience d’Hérode.

La triade diabolique

Hérode Antipas était un tyran faible, qui, devant la dénonciation de Jean Baptiste, n’avait pas le courage de reconnaître sa faute et de se séparer d’Hérodiade. Il se résout à porter sa faute, lancinante, sur sa conscience. Il vivait écartelé entre la justice que lui prêchait Jean et sa liaison avec Hérodiade. Esclave, il ne parvenait pas à se libérer. Au cours du banquet en son honneur, il est fasciné par le spectacle lascif de sa belle-fille, Salomé, et, dans une sorte de frénésie, il prononce un serment stupide. Même s’il est amené à commettre un homicide cruel contre l’Envoyé de Dieu, il n’a pas la fermeté et le courage de se dégager de sa promesse insensée. Il ne peut se permettre de perdre la face devant ses invités. Il s’est pris dans un engrenage qui le conduit à sa ruine morale, qui prélude à sa ruine politique. Plus tard, il se rendra à Rome, entraîné par Hérodiade, pour obtenir la dignité royale, mais, au contraire, l’empereur Caligula le destitua et l’exila en Gaule.
Hérodiade est une femme ambitieuse, immorale et cruelle. Tous les moyens sont bons pour parvenir à ses fins. Elle craint que les dénonciations de Jean Baptiste amènent Hérode à se séparer d’elle. Elle cherche un moyen de se débarrasser de lui, n’importe lequel. Elle va jusqu’à utiliser sa fille pour obtenir le meurtre d’un saint.

La fille d’Hérodiade, Salomé (d’après le nom que lui donne la tradition), une princesse, s’abaisse dans une danse lascive à séduire le roi. Lorsque sa mère lui suggère de demander la tête de Jean Baptiste, elle n’hésite pas à collaborer avec sa mère pour obtenir le meurtre. Elle formule même sa demande sans l’édulcorer, directement, d’une manière quasi impérieuse: “Je veux,” pas seulement je désire, mais j’exige. Quand? Aucun délai, “tout de suite”. L’ordre devient presque sadique: “tu me donnes sur un plat la tête de Jean Baptiste.” Elle ne cède pas seulement à la suggestion de sa mère, elle épouse totalement sa volonté meurtrière.

Dans son opéra, Salomé, Richard Strauss décrit cette horreur avec une telle répugnance que Hérode lui-même est révolté à la fin et crie à ses gardes, “tuez cette femme!” Jean Baptiste, à l’opposé, demeure fidèle à sa mission de témoin inébranlable de la justice et de la vérité, au milieu de ce monde immoral et cruel.

Jean-Louis D’Aragon SJ

(Français) 2022/02/03 – Mc 6, 7-13

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Jésus appelle les Douze et leur donne une mission pour la première fois. Il les envoie deux par deux. Il leur donne pouvoir sur les esprits mauvais et ils ne doivent emporter rien pour la route, ni nourriture, ni vêtement supplémentaire, ni argent. Quand ils auront trouvé l’hospitalité dans une maison, ils doivent rester au même endroit jusqu’à leur départ. Si on ne les accueille pas ou si on refuse de les écouter, ils doivent quitter l’endroit. Ils partent proclamer la nécessité de la conversion. Ils chassaient beaucoup de démons et faisaient des onctions d’huile sur les malades qui étaient guéris.

Marc a déjà mentionné que Jésus avait choisi douze disciples pour être avec lui et pour aller proclamer la venue du Règne de Dieu avec les mêmes pouvoirs que lui-même. Le but était donc, d’une part, d’être des témoins des paroles et des actions du Christ et, d’autre part, de proclamer la venue du Règne de Dieu. Ils sont envoyés pour la première fois et c’est cet envoi qui leur fera plus tard donner le nom d’apôtres, ce qui signifie envoyés.

Ils sont envoyés deux par deux. C’est peut-être pour souligner qu’ils vont présenter un témoignage puisque dans la Loi de Moïse, il faut deux témoins pour qu’une déposition soit officielle (Dt. 19,15). On voit dans les Actes que les premiers chrétiens suivaient cette règle. Ainsi, pour la première mission de Paul, l’église d’Antioche envoie Barnabé et Paul en mission parmi les Gentils.

Ils doivent être très dépouillés, ce qui a comme corollaire qu’ils doivent compter sur la Providence. Ils doivent se contenter de l’hospitalité qui leur est offerte et ne pas chercher à l’améliorer en passant de maison en maison. Ceci reflète une situation plus tardive alors que les communautés doivent se défier de ceux qui se présentent comme des missionnaires mais ne sont que des profiteurs de la charité chrétienne.

La mention d’onctions d’huile sur les malades, elle aussi, anticipe ce qui deviendra le sacrement des malades et ne représente pas une pratique de Jésus.

Le contenu de la proclamation des envoyés est à peine esquissé: ils proclament la nécessité de la conversion (métanoia, transformation du cœur, changement de direction). Dans la proclamation initiale de Jésus (Marc 1,15), comme celle de Jean Baptiste (Marc 1,4), cette conversion était reliée à l’approche du Règne de Dieu. Pour accueillir le Règne de Dieu, il fallait être prêt à une conversion, un changement profond du coeur qui amènerait un changement de direction. La même expression est employée par Pierre dans sa première proclamation après la Pentecôte et elle reviendra plusieurs fois dans des moments importants du livre des Actes.

Jean Gobeil SJ

 

(Français) 2022/02/02 – Lc 2, 22-40

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Les parents de Jésus vont au temple pour offrir le sacrifice qui représente le rachat de l’enfant: comme tout premier-né, il doit être consacré au Seigneur. Syméon, un homme juste et religieux qui attendait la Consolation d’Israël, vient au temple poussé par l’Esprit. Il prend l’enfant dans ses bras et prononce une bénédiction: Mes yeux ont vu le salut préparé à la face de tous les peuples, lumière pour éclairer les nations païennes et gloire d’Israël ton peuple. Il bénit les parents et prédit qu’il sera un signe de division. Anne, une femme prophète, à son tour proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance d’Israël. Après avoir rempli tout ce que demandait la Loi, les parents retournèrent à Nazareth. Et l’enfant grandissait en sagesse.

La scène veut montrer la réalisation de ce qui a été préparé dans l’histoire d’Israël. Le texte commence en disant littéralement: Quand furent accomplis les jours…. C’est une formule ordinairement pour parler d’un moment du plan de Dieu qui est arrivé: c’est l’aujourd’hui de Dieu dont parle l’épître aux Hébreux (3,13). S’accomplit maintenant ce que le prophète Malachie annonçait dans la première lecture : Soudain viendra dans son temple le Seigneur que vous cherchez.

Le temple a toujours représenté la présence de Dieu dans l’histoire d’Israël. On savait bien que Dieu ne pouvait être contenu dans le temple mais on avait quand même là un accès à sa présence.

Comme disait le Psaume 18 :

Vers mon Dieu je lançai mon cri; il entendit de son temple ma voix et mon cri parvint à ses oreilles.

Mais c’est d’une nouvelle présence dont parle le prophète Malachie et que le vieillard Syméon appelle la Consolation d’Israël. Ces deux personnages, Syméon, un homme juste et pieux, et la prophétesse Anne, qui étaient assidus à la prière au temple, représentent ceux qui étaient humbles et fidèles à cette attente. Avec la présence de Jésus au temple, l’Esprit Saint commence à agir: c’est lui qui pousse Syméon au temple à ce moment précis.

Il y a un autre trait qui souligne le lien avec l’histoire d’Israël et le plan de Dieu. Par trois fois est mentionné le fait que les parents de Jésus agissent par fidélité à la Loi de Moïse. Ils observent le temps fixé par la Loi et viennent accomplir deux rites prescrits par cette Loi: la purification de la mère et le rachat du premier-né. Il ne s’agit pas de la Loi telle qu’expliquée par les Pharisiens mais bien de cette Loi qui représentait la réponse du peuple de Dieu à l’Alliance qu’il lui avait offerte.

C’est cette nouvelle présence de Dieu qui sera caractérisée par la présence de l’Esprit Saint, comme nous le montrent les premiers chrétiens dans le livre des Actes.

La présentation de l’enfant au temple représente donc la réalisation de cette attente.

Jean Gobeil SJ

(Français) 2022/02/01 – Mc 5, 21-43

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Au bord du lac, une foule s’est assemblée autour de Jésus. Un chef de synagogue nommé Jaïre vient supplier Jésus de venir imposer les mains à sa petite fille qui est entre la vie et la mort. Jésus part aussitôt avec lui. Une femme qui souffrait d’une maladie incurable veut toucher le vêtement de Jésus pour être guérie. Jésus se rend compte qu’une force est sortie de lui et demande qui dans la foule l’a touché. Les disciples lui font remarquer que la foule le presse de tous côtés. La femme guérie se jette à ses pieds. Jésus lui dit: « Ta foi t’a sauvée. Va en paix. » On annonce la mort de la petite fille. Jésus rassure le père en lui disant de croire. Arrivé à la maison, il fait sortir tout le monde et, avec le père et le mère et aussi quelques disciples (Pierre, Jacques et Jean), il va où est l’enfant, la prend par la main et la fait se lever en lui disant: Thalita koum.. Les gens sont bouleversés mais Jésus recommande le silence, puis il suggère de faire manger la petite fille.

C’est un texte rempli de détails. Ce sont les souvenirs d’un témoin oculaire comme le nom du chef de synagogue et la parole de Jésus en araméen. Mais ce sont les souvenirs d’un conteur qui relate à mesure que ces souvenirs reviennent, donc pas nécessairement en ordre, comme l’âge de la petite fille qui nous est dit quand tout est fini! Ce sont des souvenirs qui ne sont pas retouchés ou édités, comme l’ignorance de Jésus sur qui l’a touché, une ignorance qui embarrassera Matthieu et Luc, de même que la remarque fort cavalière des disciples: « Comment peux-tu demander cela quand tout le monde te presse? «

Ce récit est pourtant dans la ligne de la présentation de Jésus par Marc: il est celui que Jean Baptiste annonçait comme plus puissant que lui; il avait reçu l’Esprit et affrontait les esprits mauvais qui devaient lui obéir. Il affrontait aussi les différentes forces du mal comme la lèpre et les maladies. Les deux femmes ici représentent des cas très graves. L’une a une maladie incurable: les médecins ne peuvent rien faire. En outre, comme il s’agit d’une perte de sang, elle est rituellement impure et ne doit toucher personne. L’autre finalement est considérée comme morte: les gens ont commencé les lamentations funèbres. Il suffit d’une parole de Jésus pour la ramener à la vie. Et pour la première, il a suffi qu’elle touche au vêtement de Jésus. Le Messie puissant est à l’oeuvre.

Mais les deux cas illustrent bien la démarche de la foi. Le père demande à Jésus de venir pour que sa petite fille soit sauvée. La femme pense: Si je parviens à toucher son vêtement, je serai sauvée. Et Jésus lui dit: Ta foi t’a sauvée. Ce sont donc deux beaux exemples de foi. La réponse de Jésus est irrésistible: avec le père, il se met tout de suite en route pour aller chez lui. Au toucher de la femme, la rencontre dans la foi se fait immédiatement: elle est guérie non seulement de sa maladie mais aussi de l’impureté rituelle qui l’isolait des autres.

Finalement, en dessous des mots, il semble y avoir une marque de tendresse dans la façon de Jésus de parler de la petite fille. Les serviteurs de Jaïre lui disent: Ta fille. Jaïre, lui, parle de sa petite-fille. Le narrateur, lui, parle de l’enfant. Mais pour la parole de Jésus en araméen, Marc emploie une sorte de diminutif (au neutre!) qu’on pourrait peut-être traduire par ma-toute-petite. Quand tout est terminé, Jésus, lui, continue d’être intéressé par la petite fille et recommande qu’on lui donne à manger. Il y a certainement une touche de familiarité et même de tendresse de la part de Jésus pour cette petite fille..

Jean Gobeil SJ

(Français) 2022/01/31 – Mc 5, 1-20

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Pour ce lundi, le long passage proposé à notre réflexion décrit une scène spectaculaire. L’événement se produit en terre païenne : dans la Décapole ou « au pays des Géraséniens ». Le malade qui bénéficiera du pouvoir de Jésus est un fou furieux, que personne ne pouvait maîtriser et qui hantait les tombeaux et les montagnes, se déchirant avec des pierres et poussant des cris affreux. Il semble donc que les humains aient abandonné ce forcené, l’estimant irrécupérable parce que son mal était sans remède : impossible aux simples mortels d’arracher cet individu à la foule de démons qui avaient élu domicile en lui.

Ce cas désespéré permettra une démonstration de l’étendue de la puissance de Jésus. Le possédé reconnaît cette puissance car, cette sorte d’Hercule détraqué se précipite vers Jésus, non pas pour l’attaquer et le mettre en pièces mais pour se prosterner devant lui. On s’attendrait à ce qu’il demande la guérison, comme c’est toujours le cas quand un malade rencontre Jésus, mais en fait, ce cinglé n’a même plus la faculté de la parole indépendante. Ce sont les démons qui parlent par sa bouche, le réduisant au rang d’un simple instrument. Ils demandent à Jésus de les laisser tranquilles, mais c’est bien évident qu’il n’accèdera pas à cette requête en abandonnant le pauvre homme à leur empire.

La confrontation inévitable prend des allures étranges. Jésus intime aux démons de sortir de cet homme. En fait, il semblerait qu’ils aient un porte-parole qui en leur nom, engage la négociation avec Jésus. C’est lui qui supplie, (ne me tourmentes pas), qui révèle qu’ils sont « Légion », et qui insiste pour ne pas être envoyé hors du pays. Surprenante demande qui suggère que ces démons sont sédentaires ou qu’ils ne parviendraient pas à opérer en terre sainte, car, « hors du pays » signifie probablement « en terre d’Israël ». Et c’est ce porte parole qui finit par trouver une solution : « Envoie-nous dans les porcs pour que noue entrions en eux. » Il le leur permit, et le troupeau de porcs se précipita de la falaise dans la mer. Il y en avait environ deux mille.

Les porcs sont impurs. Comme les démons. On ne devrait donc pas regretter leur noyade, métaphore de la domination irrésistible du Fils de Dieu. Mais en fait, tout ne finit pas bien! L’homme délivré des démons n’obtient pas le privilège de suivre Jésus. Ceux qui ont assisté à la scène du naufrage des porcs sont saisis de panique : ils s’enfuient, répandent la nouvelle, et à leur tour, ceux qui entendent leur récit sont saisis de crainte. Ils demandent à Jésus de s’éloigner de leur territoire. Mais pourquoi le supplient-ils de s’en aller? On pourrait avancer l’explication suivante.

L’acte de puissance que Jésus vient de poser signifie qu’il concentre en lui l’aspect redoutable du sacré : le tremendum. Cet aspect du sacré est dangereux et l’on doit s’en protéger, même et surtout parce qu’il est attirant, un peu comme un feu nocturne en plein air : les flammes captivent les insectes qui finissent par s’y brûler les ailes et tomber dans le brasier. Et si le texte n’était pas plus proche d’un conte fantastique que d’un reportage, il y aurait un autre argument pour souhaiter que le guérisseur de Nazareth retourne chez lui au plus vite : sa propre sécurité! Car, précipiter deux mille porcs dans la mer, c’est provoquer un désastre économique. Pour les gens de la Décapole, un porc n’est pas impur : c’est de la nourriture. Même de nos jours, un entrepreneur chrétien dont on provoquerait la banqueroute de cette manière réagirait violemment : il tuerait Jésus ou le poursuivrait pour dommages et intérêts.

Melchior M’Bonimpa

(Français) 2021/02/06 – Mc 6, 30-34 – St Paul Miki et ses compagnons

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La scène que présente l’Évangile d’aujourd’hui nous montre en particulier l’humanité de Jésus. Il a vraiment pris notre condition humaine, avec ses limites, mais aussi avec ses émotions et son empathie pour ses disciples et pour la foule qui le suit.

Les disciples qui rassemblent autour de Jésus ressemblent à des enfants qui reviennent à la maison, le soir, et qui racontent à leurs parents ce qu’ils ont vécu durant la journée. Leur Maître les avait envoyés en mission, deux par deux, démunis de ressources matérielles pour prolonger le ministère de Jésus et montrer par anticipation comment les chrétiens doivent continuer la mission du Christ. Leur seule force consistait dans leurs convictions personnelles et leur zèle de communiquer l’Évangile de la vérité et de la vie. Pour cette mission, Jésus leur avait “donné pouvoir de soumettre les esprits mauvais” (Mc 6, 7), de faire reculer le mal.

Les disciples reviennent auprès de Jésus, heureux d’avoir rempli la tâche qu’il leur avait confiée, mais épuisés par le travail. Ignorant leur fatigue, les gens s’attroupent autour de Jésus et de ses disciples. Le Maître constate que ses disciples sont fatigués et qu’ils ont besoin de repos. Il veut les amener à l’écart dans “un endroit tranquille.”

Jésus nous montre par cette décision que toute personne humaine doit établir un équilibre dans son existence, entre son travail et ses moments de détente. Concentrer toutes ses énergies dans une seule dimension de son être aboutit à la faillite de sa vie, parfois même à la folie. Sans aller jusqu’à l’extrême, combien de gens consacrent tout leur temps et toutes leurs énergies à leur réussite professionnelle, mais délaissent leur devoir envers leur famille.

Il arrive pourtant des circonstances exceptionnelles qui nous obligent à déroger à ces règles de notre programme de vie. Ces exceptions font appel à notre charité, la vertu suprême que Jésus nous a enseignée. Lui-même oublie son projet d’amener ses disciples à l’écart pour qu’ils se reposent. La foule, fascinée par son enseignement et par les guérisons qu’il opère, accourt et prévient même sa venue. À l’opposé des philosophes stoïciens de son temps qui réprouvaient la pitié comme une faiblesse, Jésus s’émeut face à ces gens désespérés, sans berger pour les guider et leur procurer la sécurité. Il leur consacre donc tout son temps, “ils les instruit longuement.” L’amour nous entraîne à tout laisser pour répondre à un besoin urgent. Le pauvre qui tend la main, c’est Jésus lui-même: “J’étais nu et tu m’as habillé.” (Mt 25, 36)

Jean-Louis D’Aragon SJ 

(Français) 2021/02/05 – Mc 6, 14-29 – Ste Agathe

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À la mort de grands personnages, on peut avoir l’impression qu’ils ont disparu, mais c’est une erreur, car le mouvement qu’ils ont lancé continue d’influencer l’histoire, telle une vague qui se perd au loin. L’appel à la conversion de Jean le Baptiste avait attiré des foules au baptême de pénitence qu’il pratiquait au Jourdain. Même après son exécution par le roi Hérode, le peuple pensait qu’il revivait en Jésus, qui proclamait le même message que Jean: se détourner de tout ce qui s’oppose à l’accueil du Royaume de Dieu. Le peuple, et même Hérode, associait donc étroitement Jean et Jésus, au point de croire que le premier revivait dans le second. De fait, non seulement leur prédication était semblable, mais la destinée de l’un et de l’autre sera semblable: ils offriront leur vie par fidélité à leur vocation, ils témoigneront jusqu’au bout de la vérité et de la justice divine.

À l’opposé de ces envoyés de Dieu, trois personnages vils, ambitieux et cruels incarnent ici l’injustice et le mal. Aucun crime ne leur répugne pour satisfaire leur orgueil et leur égoïsme. Lorsqu’il avait visité Rome, Hérode avait séduit l’épouse de son frère Philippe. Ambitieuse, Hérodiade avait ainsi accédé à la royauté, mais elle ne pouvait pas jouir librement de son élévation, car la dénonciation de Jean rappelait sans cesse son adultère à la conscience d’Hérode.

La triade diabolique

Hérode Antipas était un tyran faible, qui, devant la dénonciation de Jean Baptiste, n’avait pas le courage de reconnaître sa faute et de se séparer d’Hérodiade. Il se résout à porter sa faute, lancinante, sur sa conscience. Il vivait écartelé entre la justice que lui prêchait Jean et sa liaison avec Hérodiade. Esclave, il ne parvenait pas à se libérer. Au cours du banquet en son honneur, il est fasciné par le spectacle lascif de sa belle-fille, Salomé, et, dans une sorte de frénésie, il prononce un serment stupide. Même s’il est amené à commettre un homicide cruel contre l’Envoyé de Dieu, il n’a pas la fermeté et le courage de se dégager de sa promesse insensée. Il ne peut se permettre de perdre la face devant ses invités. Il s’est pris dans un engrenage qui le conduit à sa ruine morale, qui prélude à sa ruine politique. Plus tard, il se rendra à Rome, entraîné par Hérodiade, pour obtenir la dignité royale, mais, au contraire, l’empereur Caligula le destitua et l’exila en Gaule.
Hérodiade est une femme ambitieuse, immorale et cruelle. Tous les moyens sont bons pour parvenir à ses fins. Elle craint que les dénonciations de Jean Baptiste amènent Hérode à se séparer d’elle. Elle cherche un moyen de se débarrasser de lui, n’importe lequel. Elle va jusqu’à utiliser sa fille pour obtenir le meurtre d’un saint.

La fille d’Hérodiade, Salomé (d’après le nom que lui donne la tradition), une princesse, s’abaisse dans une danse lascive à séduire le roi. Lorsque sa mère lui suggère de demander la tête de Jean Baptiste, elle n’hésite pas à collaborer avec sa mère pour obtenir le meurtre. Elle formule même sa demande sans l’édulcorer, directement, d’une manière quasi impérieuse: “Je veux,” pas seulement je désire, mais j’exige. Quand? Aucun délai, “tout de suite”. L’ordre devient presque sadique: “tu me donnes sur un plat la tête de Jean Baptiste.” Elle ne cède pas seulement à la suggestion de sa mère, elle épouse totalement sa volonté meurtrière.

Dans son opéra, Salomé, Richard Strauss décrit cette horreur avec une telle répugnance que Hérode lui-même est révolté à la fin et crie à ses gardes, “tuez cette femme!” Jean Baptiste, à l’opposé, demeure fidèle à sa mission de témoin inébranlable de la justice et de la vérité, au milieu de ce monde immoral et cruel.

Jean-Louis D’Aragon SJ