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2023/10/21 – Lc 12, 8-12

Le monde autour de nous a changé de visage en moins de cinquante ans. Les normes rigides qui régissaient notre société se sont modifiées. Les valeurs qui stimulaient notre vie ne sont plus les mêmes. En somme, une révolution sans secousse a modifié l’ensemble de notre monde.

L’uniformité dans tous les domaines s’imposait autrefois : habillement, langage, comportement et foi religieuse. À cette époque, on jugeait sévèrement celui ou celle qui ne participait pas à la messe du dimanche. Aujourd’hui c’est le fidèle qui fréquente son église le dimanche que les gens remarquent. Sa foi ne rencontre pas d’oppositions violentes, mais elle s’enlise dans ce climat de doute qu’on respire partout. Manifester sa foi, même dans des occasions banales, comme une visite de sympathie et une prière dans un salon mortuaire, exige des convictions personnelles.

.Il serait exagéré de parler des chrétiens persécutés dans notre société, comme Jésus y fait allusion dans l’évangile d’aujourd’hui. Après l’Ascension du Seigneur, vers l’an 30, les chrétiens ont subi des vexations de toutes sortes : comparutions devant des juges, flagellations, emprisonnements et mises à mort. Le croyant avait le choix entre le reniement pour sauver sa vie, ou la fidélité jusqu’à la peine capitale.

De nos jours, l’opposition à la foi chrétienne n’est certainement pas aussi brutale. Elle se manifeste plutôt par un sourire narquois. On semble plaindre ces pauvres attardés, qui croient encore dans une évasion vers un au-delà. Qu’on le veuille ou non, ce sourire sceptique nous met en question ou plutôt ces moqueries nous forcent à décider face au Crucifié : cachons-nous notre communion avec Lui ou bien déclarons-nous ouvertement notre confiance en son amour ?

.Pour résister et exprimer ouvertement sa foi, sans condescendance, il faut des convictions profondes. La persécution brutale provoque soit la chute, soit un sursaut d’énergie. La moquerie des sceptiques affaiblit l’espérance. Elle joue le rôle de la neige ou du sable qui entoure les roues d’un véhicule pour l’empêcher d’avancer.

 Face au Crucifié

Trois annonces détaillées du mystère pascal scandent la montée du Christ vers Jérusalem. Après chaque annonce de sa passion, Jésus déclare clairement la condition pour être son disciple : « Quiconque veut me suivre doit porter chaque jour sa croix. » La foi vivante insère le chrétien dans le Christ pour participer à son cheminement jusqu’à sa résurrection. Cette foi est le canal vital qui transforme le croyant à l’image de son Seigneur.

Lorsque des oppositions surgissent sur le chemin vers la résurrection, qu’elles soient violentes comme la persécution ou narquoises comme les moqueries de notre monde, le chrétien a le choix entre le reniement ou l’affirmation de sa foi au Christ. Qu’il renie son Seigneur ou qu’il dissimule sa relation avec Lui, le pécheur détruit la communion avec Celui qui lui transmet la vie. La tentation est forte à notre époque du doute, non pas de renier le Christ, mais d’enfouir aux yeux de ceux qui sourient son identité avec Lui. C’est comme si on avait honte de sa croix !

Même après avoir caché au fond de nous-mêmes le signe du Christ par crainte des moqueurs, nous pouvons espérer son pardon. Il est l’Amour, le Miséricordieux, toujours prêt à rétablir la communion avec celui qui a eu honte de Lui. Il a pardonné à Pierre, qui avait affirmé par trois fois ne pas le connaître. (Lc 22,61s) Au moment où les bourreaux le crucifient, Jésus prie son Père de leur pardonner : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23,34) Au bandit qui l’implore timidement, Jésus lui promet : « Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis. » (Lc 23,43)

Le péché impardonnable

Comment Jésus peut-il dire que si quelqu’un blasphème l’Esprit Saint, ce péché ne lui sera jamais pardonnée ? L’amour de Dieu est-il limité, ne couvrant pas le péché contre l’Esprit, qui serait impardonnable ? Si Dieu n’est pas infini dans son amour, Il n’est plus Dieu.

Si on ne voit pas de solution du côté de Dieu, on peut la découvrir du côté du pécheur. Dans les évangiles de Marc (3,29) et de Matthieu (12,31-33), la déclaration de Jésus sur le péché contre l’Esprit suit l’interprétation malicieuse des exorcismes du Christ par les docteurs et les Pharisiens : « C’est par le prince des démons qu’il chasse les démons. » Au lieu d’attribuer à Dieu ces guérisons, ils les rattachent au prince du mal. La grâce et la puissance de Dieu sont, pour eux, l’œuvre du démon.

Nos actes nous suivent, ils pénètrent et demeurent en nous, dans un sens positif ou négatif. Si on perd progressivement la faculté de reconnaître Dieu dans les signes qu’Il nous présente, on devient sourd à sa parole et à son appel au bonheur. Avec les refus répétés, on ferme ses yeux et ses oreilles, quand Dieu se présente. Un muscle ou une faculté inactive pendant des années devient amorphe, sans vie. Pourquoi le pardon n’est-il plus possible ? Parce que le repentir, la conversion, cette ouverture pour accueillir le pardon est devenue impossible. Ce qui est bon est jugé comme le mal ; le mal est apprécié comme le bien. C’est la perte du jugement moral, du gouvernail pour diriger sa vie. Le navire ou l’avion sans gouvernail se précipite fatalement vers la catastrophe.

Jean-Louis D’Aragon SJ

2023/10/20 – Lc 12, 1-7

L’auditoire de Jésus est maintenant différent, mais le Christ continue la critique des Pharisiens qu’il avait commencé dans la salle à dîner où il avait été invité. Une foule considérable entoure Jésus et ses disciples. Quand le Christ s’adresse au cercle intime des siens, ce n’est pas pour leur communiquer un enseignement secret, mais pour les instruire, afin qu’ils soient en mesure de transmettre l’Évangile à tous. La foule, représentant l’humanité entière, entendra la Bonne Nouvelle du salut et du bonheur.

Le levain de l’hypocrisie

Ce ferment enfoui dans la pâte, symbolise la corruption et l’impureté. Le levain signifie l’enseignement des Pharisiens, qui mène à la ruine. Le danger de leur doctrine se cache sous un masque. L’hypocrite est celui qui revêt une façade qui contredit ce qu’il est intérieurement. Il affiche une apparence, comme les acteurs du théâtre ancien, qui changeaient de masques au milieu d’une pièce, selon l’un des rôles qu’ils devaient interpréter. Cette coutume du théâtre s’est transposée dans la vie des gens  à travers les âges et jusqu’à nos jours. Nous cédons tous à la tentation de porter un masque différent selon les personnes que nous rencontrons. Sommes-nous francs avec ceux que nous rencontrons? Parlons-nous de la même manière à un riche et à un pauvre! Au contraire de ce dédoublement de personnalité, la franchise consiste à afficher devant les autres ce que nous sommes intérieurement, sans essayer de jouer une comédie différente devant les gens que nous rencontrons.

L’hypocrisie produit deux conséquences néfastes. D’abord on veut par ce subterfuge tromper les gens à qui on s’adresse. Au moyen de ce jeu théâtral, nous leur montrons un visage qui n’est pas vraiment le nôtre, qui n’exprime pas ce que nous sommes. En les trompant, on détruit la confiance qui est la condition essentielle pour établir les ponts de communication avec nos semblables. L’hypocrisie détruit les relations avec tout le monde et enferme l’hypocrite dans l’isolement.

Mais, en plus, l’hypocrite s’inflige à lui-même un tort grave. Son dédoublement de personnalité, extérieure et intérieure, qu’il joue pour tromper les autres, l’amène à se tromper lui-même et…à se détruire. Toute division, qu’elle soit physique ou morale, est un mal qui détruit. Pensons au cancer ou à la schizophrénie, ces maladies aux conséquences mortelles. En dénonçant l’hypocrisie, Jésus nous engage à réaliser l’unité en nous-mêmes, pour notre santé physique et morale, qui est la condition fondamentale du salut et de la vie.

La manie détestable du secret

De nos jours, on réclame la transparence à tous les niveaux de la société. On déteste les « cachotteries ». Pour être fidèles à l’enseignement de Jésus, nous, chrétiens, devons donner l’exemple de la transparence. Les secrets suscitent toujours des soupçons de tout ordre et détruisent les rapports humains. Ceux qui se cachent et qui ne sont pas francs se défient des autres et détruisent toute communication.

L’Évangile est le trésor qui enseigne le seul vrai chemin de la vie. Aussi il ne ressemble aucunement à ces religions à mystères, si populaires dans le monde gréco-romain, qui s’organisaient en clubs fermés. L’Église, qui prolonge la mission de Jésus, a le devoir d’être transparente et de ne pas essayer de cacher quoi que ce soit, même les scandales de son histoire. Tout secret finit pas être découvert et cette découverte, finalement, a des conséquences beaucoup plus graves que ce qui était caché. Devant le Juge suprême, tout secret disparaîtra. La vérité brillera aux yeux de tous.

Bannir toute peur !

Celui qui a éliminé l’hypocrisie de sa vie et qui ne cache rien est une personne franche et libre, que tous estiment. Elle ne craint rien, ni personne, sauf le Souverain Juge. L’opinion des autres, leur sourire moqueur et même la persécution ne devraient pas l’effrayer. Le regretté pape Jean-Paul II a répété tout au long de son pontificat cet encouragement: « N’ayez pas peur ! » Elle est bien vraie cette réponse du grand prêtre à l’officier qui gémit sur la situation déplorable de la religion traditionnelle sous la reine impie, Athalie :

« Je crains Dieu, cher Abner, et n’ai point d’autre crainte. »

Le premier motif pour un chrétien de ne rien craindre découle de l’Évangile, qui est la vérité sur le sens de sa vie et qui assure la fermeté de son espérance. Cette Bonne Nouvelle vient de Dieu, qui veille sur tout ce qu’il a créé, même sur le brin d’herbe, selon les anciens rabbins. Combien plus le Seigneur protège-t-il le disciple de son Fils, qui annonce et vit l’Évangile, sans peur, ni dissimulation.

Jean-Louis D’Aragon SJ

2023/10/19 – Lc 11, 47-54

Après s’être adressé à des Pharisiens en général, Jésus s’est adressé aux légistes, c’est-à-dire à des scribes, des spécialiste de la Loi. Il a commencé par les déclarer malheureux parce qu’ils chargeaient les gens de fardeaux impossibles à porter alors qu’eux-mêmes grâce à leur savoir réussissaient à les éviter. Il les accuse dans notre texte de faire partie de la génération de ceux qui ont tué les prophètes. Ils continueront à tuer les prophètes et les apôtres ou à les persécuter. Il les accuse ensuite d’avoir la clé de la connaissance de la Loi mais de n’être pas entré dans cette connaissance et d’avoir empêché d’entrer ceux qui désiraient y avoir accès. Le résultat de ces paroles est que l’opposition des Pharisiens et des scribes contre Jésus se durcit.

Les premières accusations, celles adressées aux Pharisiens en général, pouvaient servir d’avertissements pour la communauté de Luc. Il s’agissait de dangers qui restent toujours présents comme la préoccupation des détails ou des choses secondaires au point de faire oublier les choses essentielles. Par ailleurs, il y a toujours aussi la tentation de mettre la religion au service de son avantage personnel plutôt que celui de Dieu ou celui des autres.

Mais les accusations de notre texte, adressées aux docteurs de la Loi, visent d’abord les adversaires de Jésus qui seront aussi les adversaires de ceux qui parlent au nom de Dieu, les prophètes et les apôtres. Jésus rappelle que les prophètes ont été persécutés et mis à mort. Il donne des exemples tirés de traditions populaires sur la vie des prophètes. Il parle d’Abel qui, selon ces traditions, aurait été mis à mort par Caïn parce qu’il parlait de la justice de Dieu. Ensuite, il mentionne Zacharie, le dernier de la liste des prophètes, qui aurait été lapidé sur le parvis du temple. En accusant les scribes de bâtir des tombeaux pour les prophètes, ils les accusent d’une façon imagée de vénérer les prophètes seulement quand ils sont morts! Ils sont ainsi solidaires de leurs ancêtres qui les ont exécutés. Il y a peut-être une prémonition de Jésus, qui en tant qu’envoyé du Père est le prophète par excellence: il partagera le sort des prophètes de la main des autorités religieuses. Il annonce en tout cas que cette opposition continuera pour les prophètes et les apôtres chrétiens.

Une fois refusée la voix des prophètes, que reste-t-il? L’accès à la parole de Dieu dans la Bible ?

Les docteurs de la Loi devraient être ceux qui ouvrent à la connaissance de la parole de Dieu mais par leur souci des détails de l’observance des rites ils ne voient plus l’essentiel et empêchent les autres d’avoir accès à la connaissance de Dieu : ils sont des aveugles conduisant des aveugles, comme a déjà  dit Jésus (Matthieu 15,14). Luc termine en disant que leur opposition à Jésus ne fait que grandir.

Jean Gobeil SJ

2023/10/18 – Lc 10, 1-9

Jésus choisit 72 disciples et les envoie en mission comme il avait fait pour les 12 (Luc 9,1). Ils doivent commencer par prier Dieu d’envoyer des ouvriers dans sa moisson. Ils ne doivent pas mettre leur confiance en autre chose que la Providence. Ils ont des pouvoirs de guérison et leur mission est d’annoncer: Le Règne de Dieu est venu tout proche de vous.

72 est le chiffre de toutes les nations. La mission qui avait été confiée aux Douze est maintenant confiée aux disciples en général. Cela sera confirmé après la Résurrection quand Jésus apparaîtra non seulement aux Onze mais aussi à leurs compagnons pour leur confirmer leur mission d’être les témoins devant toutes les nations de la réalisation des Écritures en sa personne. (Luc 24, 47-48)

C’est aujourd’hui la fête de saint Luc. En rédigeant ce passage de l’évangile, il devait bien, comme tout disciple chrétien, se sentir impliqué avec ces 72.

D’un point de vue historique, on sait bien peu de choses sur Luc. C’est même là une garantie qu’il n’est pas un nom fictif comme auteur d’un évangile. Pour un nom fictif on aurait choisi quelqu’un de plus important, un apôtre par exemple. Paul parle de Luc comme du cher médecin (Colossiens 4,14) et le mentionne parmi ceux qui sont avec lui et qui ne sont pas de la Circoncision; c’est dire qu’il est un non-juif. Il le mentionne deux autres fois parmi ceux qui se joignent à ses salutations.

Par contre, si on parle de l’auteur de l’évangile qui porte son nom, on peut dire beaucoup de choses. Il est le seul à commencer l’évangile par une note bien personnelle. Il connaît, dit-il, beaucoup de récits qui ont été composés avec ce que les témoins oculaires de Jésus avaient transmis. Il veut à son tour écrire quelque chose après s’être soigneusement informé sur tout depuis les origines. En somme, il a beaucoup travaillé. Il y a eu pour lui beaucoup plus de transpiration que d’inspiration!

Il écrit pour des non-juifs. Il trouve donc que c’est un motif de confiance pour eux de voir l’intérêt que Jésus portait à ceux qui étaient considérés comme des marginaux dans la société juive. Il y a les malades, les lépreux, les gens considérés comme pécheurs publics, les collecteurs d’impôt comme Zachée (Luc 19). A l’occasion il y a même un centurion que même les Juifs lui recommandent parce qu’il leur a bâti la synagogue. De lui, Jésus dira: Pas même en Israël, je n’ai trouvé une telle foi.  (Luc 5,9)

Les femmes ne sont pas oubliées. Il donne leurs noms et nous révèlent un point important. Elles accompagnaient Jésus, depuis la Galilée jusqu’au Calvaire et au tombeau. Ce sont elles, note Luc en les nommant, qui les assistaient de leurs biens (Luc 8) Ce sont elles qui auront la première annonce de la résurrection et iront en avertir les apôtres. Mais elles auront beau leur répéterils ne les crurent pas.   (24,10-11)

L’évangile de Luc est l’évangile des pardons. On pense au récit de la pécheresse pardonnée (7,36),  à l’appel de Zachée (19) et à tout le chapitre 15 avec les trois paraboles propres à Luc: le berger qui a perdu une brebis,  la femme qui a perdu une drachme dans sa maison, le père de l’enfant prodigue. Dans ces trois figures de pardon, l’atmosphère est à la réjouissance.

Dans la Passion, il y le pardon des bourreaux et du bon larron. Une grande fresque du Paradis dans un monastère grec des Météores montre le Seigneur, les saints, les anges, tous splendides, excepté la figue d’un homme presque nu dans un coin. Jésus lui avait dit: Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le Paradis. Aujourd’hui, avait dit Jésus. Si bien que le bon larron n’a même pas eu le temps de s’habiller!

Enfin, il y a la perspective de Luc dans ses trois chapitres sur l’enfance de Jésus: avec l’Incarnation, le Règne de Dieu est présent et l’Esprit est donné, d’où la joie et les chants d’action de grâce. C’est ce que les 72 devaient annoncer:

 Le Royaume de Dieu est tout proche de vous.

C’est ce que tout disciple doit annoncer.

Jean Gobeil SJ  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2023/10/17 – Lc 11, 37-41

Un pharisien invite Jésus à un repas puis s’étonne que Jésus n’ait pas fait son ablution avant de commencer. Jésus blâme le pharisien de ne s’occuper que de la purification extérieure des plats et de ne rien faire pour l’impureté intérieure dû à la cupidité: en purifiant l’intérieur par l’aumône tout serait pur pour lui.

Un problème de l’Église primitive a été celui des repas où des non-juifs convertis mangeaient avec des Juifs convertis qui tenaient encore aux lois de la pureté rituelle et se sentaient contaminés par cette présence de païens convertis. On peut voir un reflet de ce problème dans le fait que Luc rapporte par trois fois des rencontres de Jésus dans des repas  avec des pharisiens qui sont pour lui des occasions de se prononcer sur ces traditions des anciens.

La première fois, lors d’un repas chez Simon le pharisien, une pécheresse connue vient arroser de ses larmes les pieds du Seigneur. Elle les essuie et verse du parfum sur ses pieds. Simon pense alors que si Jésus était prophète il saurait qui est cette femme et il ne se laisserait pas toucher par elle et se rendre ainsi impur. Or Jésus sent l’objection et reconnaît dans le geste de la femme un geste d’amour que Simon est incapable de faire parce qu’il pense n’avoir rien à se faire pardonner.  Ce beau texte est propre à Luc (7,36).

La troisième fois vient plus tard quand l’opposition des pharisiens s’est durcie. L’invitation est faite par un groupe de pharisiens qui veulent piéger Jésus à l’occasion d’un repas le jour du sabbat. Un hydropique se présente. Jésus le guérit en soulignant que la loi de la charité passe avant la loi du sabbat. Cet incident est encore propre à Luc. (14,1)

Dans les textes d’aujourd’hui (encore propre à Luc), l’invitation du pharisien ne semble pas provenir d’une intention malveillante. Il a entendu Jésus parler à la foule et l’invite à prendre le repas du midi, un repas qui n’est pas aussi important que celui du soir. Or Jésus se met à table sans faire d’ablutions pour se purifier d’impuretés rituelles possibles.  Les ablutions sont une sorte de remède religieux, une purification des contacts qui rendent quelqu’un impropre au culte. Après tout, Jésus vient d’être en contact avec la foule et il a même guéri un démoniaque. Le pharisien, d’une façon ou d’une autre manifeste son étonnement ce que Jésus comprend très bien.

A la façon des grands prophètes, Jésus encore une fois va rappeler la différence entre ce qui est secondaire et ce qui est essentiel. A mettre toute l’importance sur des gestes extérieurs, qui ne sont pas mauvais, dira Jésus, mais qui sont secondaires, on en vient à négliger et même à oublier les choses importantes. Et dans le verset qui suit notre texte, Jésus dit quelles sont ces choses   importantes:

Mais malheur à vous, les Pharisiens, qui acquittez la dîme de la menthe, de la rue et de toute plante potagère, et qui délaissez la justice et l’amour de Dieu.  (11,42)

La justice: on ne peut avoir l’amour du prochain sans avoir d’abord la justice. Et le prophète Amos avait dit qu’on ne peut avoir l’amour de Dieu sans avoir d’abord la justice. Il avait rapporté la Parole de Dieu:

Je hais, je méprise vos fêtes et je ne puis sentir vos réunions solennelles. …Écarte de moi le bruit de tes cantiques, que je n’entende pas la musique de tes harpes. Mais que le droit coule comme de l’eau, et la justice, comme un torrent qui ne tarit pas.       ( Amos 5,21-24)

La justice et l’amour de Dieu, dit Jésus. Le prophète Osée, lui aussi, avait parlé de l’amour de Dieu qu’il appelait aussi la connaissance de Dieu. Et cette connaissance de Dieu était plus importante que les meilleurs sacrifices comme les holocaustes. Osée rapporte la Parole suivante:

Car c’est l’amour qui me plaît et non les sacrifices, la connaissance de Dieu plutôt que les holocaustes. (Osée 6,6)

En somme c’est le premier et le second commandement qui nous remettent sur l’essentiel et ils ne peuvent être remplacés par des gestes extérieurs ou des rites mécaniques.

Jean Gobeil SJ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2023/10/16 – Lc 11, 29-32

La foule s’amasse probablement à la recherche de signes spectaculaires puisque Jésus accuse cette génération de chercher des signes. Le seul signe sera la personne même de Jésus comme la personne de Jonas a été le signe pour la population de Ninive. La reine de Saba n’a pas eu besoin d’autre signe que les paroles de sagesse de Salomon et maintenant il y a ici beaucoup plus que Salomon. Les gens de Ninive se sont convertis lors de la proclamation de Jonas et il y a ici bien plus que Jonas.

Au milieu de controverses et de gens qui réclament un signe dans le ciel, un femme proclame son admiration en déclarant bienheureuse la mère de Jésus. Sans la contredire, Jésus déclare qui sont vraiment bienheureux: ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui l’observent. La grandeur de la foi est plus que la maternité charnelle.

Comme la foule s’amasse et que sont encore là ceux qui venaient de réclamer des signes dans le ciel, Jésus va dire quels sont les signes qui sont importants et quelle doit être la réponse à ces signes. Il rappelle d’abord l’exemple des gens de Ninive dans l’histoire du prophète Jonas. Les habitants de Ninive sont des Assyriens qui non seulement sont des païens mais encore un peuple très belliqueux.

Ce sont eux qui détruiront Samarie, la capitale du royaume d’Israël (royaume du nord) en 722 et feront déporter sa population. Or, le seul signe qui est donné à la population de Ninive est la parole du prophète Jonas qui annonce que Dieu, dans 40 jours,  va détruire Ninive à cause de ses fautes. Toute la population crut à la parole de Dieu et on décréta un jeûne complet du roi jusqu’aux animaux.

Devant cette réaction, Dieu se repentit du mal dont il les avait menacés, il ne le réalisa pas, au grand chagrin de Jonas de voir une belle prédiction complètement gaspillée! C’est pourtant la personne de Jonas et sa parole qui ont été le signe pour ces païens. Ils n’ont pas seulement écouté la parole mais ils ont agi à cause d’elle: ils l’ont observée. Il en sera de même pour le Fils de l’homme: c’est lui et sa parole qui sera le signe.

Il en fut de même pour la reine de Saba: Salomon et ses paroles de sagesse lui ont suffi comme signe.

Jésus déclare que la reine de Saba et les gens de Ninive se lèveront pour condamner cette génération qui n’est pas satisfaite d’un signe qui est plus grand que Jonas et plus grand que Salomon.

Jean Gobeil SJ 

 

2022/10/15 – Lc 12, 8-12

Le monde autour de nous a changé de visage en moins de cinquante ans. Les normes rigides qui régissaient notre société se sont modifiées. Les valeurs qui stimulaient notre vie ne sont plus les mêmes. En somme, une révolution sans secousse a modifié l’ensemble de notre monde.

L’uniformité dans tous les domaines s’imposait autrefois : habillement, langage, comportement et foi religieuse. À cette époque, on jugeait sévèrement celui ou celle qui ne participait pas à la messe du dimanche. Aujourd’hui c’est le fidèle qui fréquente son église le dimanche que les gens remarquent. Sa foi ne rencontre pas d’oppositions violentes, mais elle s’enlise dans ce climat de doute qu’on respire partout. Manifester sa foi, même dans des occasions banales, comme une visite de sympathie et une prière dans un salon mortuaire, exige des convictions personnelles.

Il serait exagéré de parler des chrétiens persécutés dans notre société, comme Jésus y fait allusion dans l’évangile d’aujourd’hui. Après l’Ascension du Seigneur, vers l’an 30, les chrétiens ont subi des vexations de toutes sortes : comparutions devant des juges, flagellations, emprisonnements et mises à mort. Le croyant avait le choix entre le reniement pour sauver sa vie, ou la fidélité jusqu’à la peine capitale.

De nos jours, l’opposition à la foi chrétienne n’est certainement pas aussi brutale. Elle se manifeste plutôt par un sourire narquois. On semble plaindre ces pauvres attardés, qui croient encore dans une évasion vers un au-delà. Qu’on le veuille ou non, ce sourire sceptique nous met en question ou plutôt ces moqueries nous forcent à décider face au Crucifié : cachons-nous notre communion avec Lui ou bien déclarons-nous ouvertement notre confiance en son amour ?

Pour résister et exprimer ouvertement sa foi, sans condescendance, il faut des convictions profondes. La persécution brutale provoque soit la chute, soit un sursaut d’énergie. La moquerie des sceptiques affaiblit l’espérance. Elle joue le rôle de la neige ou du sable qui entoure les roues d’un véhicule pour l’empêcher d’avancer.

Face au Crucifié

Trois annonces détaillées du mystère pascal scandent la montée du Christ vers Jérusalem. Après chaque annonce de sa passion, Jésus déclare clairement la condition pour être son disciple : « Quiconque veut me suivre doit porter chaque jour sa croix. » La foi vivante insère le chrétien dans le Christ pour participer à son cheminement jusqu’à sa résurrection. Cette foi est le canal vital qui transforme le croyant à l’image de son Seigneur.

Lorsque des oppositions surgissent sur le chemin vers la résurrection, qu’elles soient violentes comme la persécution ou narquoises comme les moqueries de notre monde, le chrétien a le choix entre le reniement ou l’affirmation de sa foi au Christ. Qu’il renie son Seigneur ou qu’il dissimule sa relation avec Lui, le pécheur détruit la communion avec Celui qui lui transmet la vie. La tentation est forte à notre époque du doute, non pas de renier le Christ, mais d’enfouir aux yeux de ceux qui sourient son identité avec Lui. C’est comme si on avait honte de sa croix !

Même après avoir caché au fond de nous-mêmes le signe du Christ par crainte des moqueurs, nous pouvons espérer son pardon. Il est l’Amour, le Miséricordieux, toujours prêt à rétablir la communion avec celui qui a eu honte de Lui. Il a pardonné à Pierre, qui avait affirmé par trois fois ne pas le connaître. (Lc 22,61s) Au moment où les bourreaux le crucifient, Jésus prie son Père de leur pardonner : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23,34) Au bandit qui l’implore timidement, Jésus lui promet : « Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis. » (Lc 23,43)

Le péché impardonnable

Comment Jésus peut-il dire que si quelqu’un blasphème l’Esprit Saint, ce péché ne lui sera jamais pardonnée ? L’amour de Dieu est-il limité, ne couvrant pas le péché contre l’Esprit, qui serait impardonnable ? Si Dieu n’est pas infini dans son amour, Il n’est plus Dieu.

Si on ne voit pas de solution du côté de Dieu, on peut la découvrir du côté du pécheur. Dans les évangiles de Marc (3,29) et de Matthieu (12,31-33), la déclaration de Jésus sur le péché contre l’Esprit suit l’interprétation malicieuse des exorcismes du Christ par les docteurs et les Pharisiens : « C’est par le prince des démons qu’il chasse les démons. » Au lieu d’attribuer à Dieu ces guérisons, ils les rattachent au prince du mal. La grâce et la puissance de Dieu sont, pour eux, l’œuvre du démon.

Nos actes nous suivent, ils pénètrent et demeurent en nous, dans un sens positif ou négatif. Si on perd progressivement la faculté de reconnaître Dieu dans les signes qu’Il nous présente, on devient sourd à sa parole et à son appel au bonheur. Avec les refus répétés, on ferme ses yeux et ses oreilles, quand Dieu se présente. Un muscle ou une faculté inactive pendant des années devient amorphe, sans vie. Pourquoi le pardon n’est-il plus possible ? Parce que le repentir, la conversion, cette ouverture pour accueillir le pardon est devenue impossible. Ce qui est bon est jugé comme le mal ; le mal est apprécié comme le bien. C’est la perte du jugement moral, du gouvernail pour diriger sa vie. Le navire ou l’avion sans gouvernail se précipite fatalement vers la catastrophe.

Jean-Louis D’Aragon SJ

2022/10/14 – Lc 12, 1-7

L’auditoire de Jésus est maintenant différent, mais le Christ continue la critique des Pharisiens qu’il avait commencé dans la salle à dîner où il avait été invité. Une foule considérable entoure Jésus et ses disciples. Quand le Christ s’adresse au cercle intime des siens, ce n’est pas pour leur communiquer un enseignement secret, mais pour les instruire, afin qu’ils soient en mesure de transmettre l’Évangile à tous. La foule, représentant l’humanité entière, entendra la Bonne Nouvelle du salut et du bonheur.

Le levain de l’hypocrisie

Ce ferment enfoui dans la pâte, symbolise la corruption et l’impureté. Le levain signifie l’enseignement des Pharisiens, qui mène à la ruine. Le danger de leur doctrine se cache sous un masque. L’hypocrite est celui qui revêt une façade qui contredit ce qu’il est intérieurement. Il affiche une apparence, comme les acteurs du théâtre ancien, qui changeaient de masques au milieu d’une pièce, selon l’un des rôles qu’ils devaient interpréter. Cette coutume du théâtre s’est transposée dans la vie des gens  à travers les âges et jusqu’à nos jours. Nous cédons tous à la tentation de porter un masque différent selon les personnes que nous rencontrons. Sommes-nous francs avec ceux que nous rencontrons? Parlons-nous de la même manière à un riche et à un pauvre! Au contraire de ce dédoublement de personnalité, la franchise consiste à afficher devant les autres ce que nous sommes intérieurement, sans essayer de jouer une comédie différente devant les gens que nous rencontrons.

L’hypocrisie produit deux conséquences néfastes. D’abord on veut par ce subterfuge tromper les gens à qui on s’adresse. Au moyen de ce jeu théâtral, nous leur montrons un visage qui n’est pas vraiment le nôtre, qui n’exprime pas ce que nous sommes. En les trompant, on détruit la confiance qui est la condition essentielle pour établir les ponts de communication avec nos semblables. L’hypocrisie détruit les relations avec tout le monde et enferme l’hypocrite dans l’isolement.

Mais, en plus, l’hypocrite s’inflige à lui-même un tort grave. Son dédoublement de personnalité, extérieure et intérieure, qu’il joue pour tromper les autres, l’amène à se tromper lui-même et…à se détruire. Toute division, qu’elle soit physique ou morale, est un mal qui détruit. Pensons au cancer ou à la schizophrénie, ces maladies aux conséquences mortelles. En dénonçant l’hypocrisie, Jésus nous engage à réaliser l’unité en nous-mêmes, pour notre santé physique et morale, qui est la condition fondamentale du salut et de la vie.

La manie détestable du secret

De nos jours, on réclame la transparence à tous les niveaux de la société. On déteste les « cachotteries ». Pour être fidèles à l’enseignement de Jésus, nous, chrétiens, devons donner l’exemple de la transparence. Les secrets suscitent toujours des soupçons de tout ordre et détruisent les rapports humains. Ceux qui se cachent et qui ne sont pas francs se défient des autres et détruisent toute communication.

L’Évangile est le trésor qui enseigne le seul vrai chemin de la vie. Aussi il ne ressemble aucunement à ces religions à mystères, si populaires dans le monde gréco-romain, qui s’organisaient en clubs fermés. L’Église, qui prolonge la mission de Jésus, a le devoir d’être transparente et de ne pas essayer de cacher quoi que ce soit, même les scandales de son histoire. Tout secret finit pas être découvert et cette découverte, finalement, a des conséquences beaucoup plus graves que ce qui était caché. Devant le Juge suprême, tout secret disparaîtra. La vérité brillera aux yeux de tous.

Bannir toute peur!

Celui qui a éliminé l’hypocrisie de sa vie et qui ne cache rien est une personne franche et libre, que tous estiment. Elle ne craint rien, ni personne, sauf le Souverain Juge. L’opinion des autres, leur sourire moqueur et même la persécution ne devraient pas l’effrayer. Le regretté pape Jean-Paul II a répété tout au long de son pontificat cet encouragement: « N’ayez pas peur ! » Elle est bien vraie cette réponse du grand prêtre à l’officier qui gémit sur la situation déplorable de la religion traditionnelle sous la reine impie, Athalie : « Je crains Dieu, cher Abner, et n’ai point d’autre crainte. »

Le premier motif pour un chrétien de ne rien craindre découle de l’Évangile, qui est la vérité sur le sens de sa vie et qui assure la fermeté de son espérance. Cette Bonne Nouvelle vient de Dieu, qui veille sur tout ce qu’il a créé, même sur le brin d’herbe, selon les anciens rabbins. Combien plus le Seigneur protège-t-il le disciple de son Fils, qui annonce et vit l’Évangile, sans peur, ni dissimulation.

 Jean-Louis D’Aragon SJ

2022/10/13 – Lc 11, 47-54

Après s’être adressé à des Pharisiens en général, Jésus s’est adressé aux légistes, c’est-à-dire à des scribes, des spécialiste de la Loi. Il a commencé par les déclarer malheureux parce qu’ils chargeaient les gens de fardeaux impossibles à porter alors qu’eux-mêmes grâce à leur savoir réussissaient à les éviter. Il les accuse dans notre texte de faire partie de la génération de ceux qui ont tué les prophètes. Ils continueront à tuer les prophètes et les apôtres ou à les persécuter. Il les accuse ensuite d’avoir la clé de la connaissance de la Loi mais de n’être pas entré dans cette connaissance et d’avoir empêché d’entrer ceux qui désiraient y avoir accès. Le résultat de ces paroles est que l’opposition des Pharisiens et des scribes contre Jésus se durcit.

Les premières accusations, celles adressées aux Pharisiens en général, pouvaient servir d’avertissements pour la communauté de Luc. Il s’agissait de dangers qui restent toujours présents comme la préoccupation des détails ou des choses secondaires au point de faire oublier les choses essentielles. Par ailleurs, il y a toujours aussi la tentation de mettre la religion au service de son avantage personnel plutôt que celui de Dieu ou celui des autres.

Mais les accusations de notre texte, adressées aux docteurs de la Loi, visent d’abord les adversaires de Jésus qui seront aussi les adversaires de ceux qui parlent au nom de Dieu, les prophètes et les apôtres. Jésus rappelle que les prophètes ont été persécutés et mis à mort. Il donne des exemples tirés de traditions populaires sur la vie des prophètes. Il parle d’Abel qui, selon ces traditions, aurait été mis à mort par Caïn parce qu’il parlait de la justice de Dieu. Ensuite, il mentionne Zacharie, le dernier de la liste des prophètes, qui aurait été lapidé sur le parvis du temple. En accusant les scribes de bâtir des tombeaux pour les prophètes, ils les accuse d’une façon imagée de vénérer les prophètes seulement quand ils sont morts! Ils sont ainsi solidaires de leurs ancêtres qui les ont éxécutés. Il y a peut-être une prémonition de Jésus, qui en tant qu’envoyé du Père est le prophète par excellence: il partagera le sort des prophètes de la main des autorités religieuses. Il annonce en tout cas que cette opposition continuera pour les prophètes et les apôtres chrétiens.

Une fois refusée la voix des prophètes, que reste-t-il? L’accès à la parole de Dieu dans la Bible ? Les docteurs de la Loi devraient être ceux qui ouvrent à la connaissance de la parole de Dieu mais par leur souci des détails de l’observance des rites ils ne voient plus l’essentiel et empêchent les autres  d’avoir accès à la connaissance de Dieu: ils sont des aveugles conduisant des aveugles, comme a déjà  dit Jésus (Matthieu 15,14). Luc termine en disant que leur opposition à Jésus ne fait que grandir.

Jean Gobeil SJ

2022/10/12 – Lc 11, 42-46

Jésus déclare malheureux les pharisiens parce qu’ils observent des détails et oublient l’essentiel. Il les déclare malheureux aussi parce qu’ils se soucient des avantages extérieurs de leur position mais ne s’occupent pas de se convertir à l’intérieur d’eux-mêmes. Finalement il déclare malheureux les docteurs de la Loi qui sont plus intéressés à imposer aux autres des obligations de la Loi qu’eux-mêmes n’observent pas.

Jésus est allé dîner chez un pharisien qui s’est étonné, sinon scandalisé, de ce que Jésus n’avait pas observé la purification rituelle des mains. La réaction de Jésus a été de dénoncer la pratique des pharisiens qui se préoccupent des purifications extérieures des objets mais ne se soucient pas de la purification intérieure. Dans notre texte, les dénonciations de Jésus continuent de même que l’opposition entre des gestes extérieurs et des attitudes intérieures.

Les pharisiens se soucient des détails et oublient l’essentiel, déclare Jésus. La Loi demandait la dîme  du blé, du vin et de l’huile (Ne.13,10-13) comme reconnaissance du Dieu créateur qui donnait le blé, les vignes et les oliviers. Mais les pharisiens multipliaient les applications de cette Loi, comme la dîme sur la menthe et la roue qui est une plante qui pousse sans même être cultivée. Cette observance matérielle de la Loi leur donne bonne conscience mais leur fait laisser de côté  l’essentiel comme, dit Jésus, la justice et l’amour de Dieu. Ces deux thèmes sont  les premiers enseignements des premiers prophètes.

Amos, le premier prophète dont nous avons la prédication, a dénoncé avec violence les injustices sociales, l’exploitation des pauvres et une religion avec des gestes purement extérieurs. Pour lui, il n’y a pas de relation avec Dieu s’il n’y a pas de relation de justice avec le prochain.

Le prophète Osée, qui est venu après lui, a parlé de l’amour de Dieu comme de l’amour d’un père pour son petit enfant, un amour personnel et intime, un amour qui a de la compassion et de la tendresse, qui demandait comme réponse un amour semblable de la part des hommes. Il dénonce une religion de gestes purement extérieurs: C’est l’amour qui me plaît et non les sacrifices. (Osée,6,6)

Il est aussi conscient des injustices mais pour lui, il n’y aura pas de société juste sans l’amour de Dieu. Amos parlait de la dimension horizontale de la relation avec Dieu; Osée parle de la dimension verticale.

Jésus a réuni ces deux aspects quand il a dit qu’il ne fallait pas séparer du commandement de l’amour de Dieu celui de l’amour du prochain. Mais pour avoir une vraie relation avec Dieu, il faut la conversion du coeur. En négligeant cela, les pharisiens avec leurs observances méticuleuses peuvent avoir une bonne conscience et présenter un extérieur impressionnant: ils sont comme ces tombeaux qui ont une belle apparence extérieure mais ne contiennent aucune vie.

Jean Gobeil SJ