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(Français) 2022/09/24 – Lc 0, 43b-45

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La première lecture de la liturgie nous présente aujourd’hui une description poétique de la descente de l’être humain vers la mort. L’auteur de l’Ecclésiaste (11,9 – 12,8), un sage, considère la mort avec sérénité et il décrit avec élégance les signes qui révèlent son approche. Mais il n’a aucune espérance dans l’avenir. Tout se termine pour lui dans « la vanité » d’ici-bas. À la mort, il ne reste rien de ce qu’on a vécu de beau et de bien.

Le problème de la mort s’est imposé à toutes les époques et à tous les êtres humains. C’est en apparence la tragédie d’une fin brutale pour toute personne qui aspire normalement à vivre sans limites. Sans la foi, toute personne peut appréhender cette fin comme un trou noir, qui n’a aucun sens. Puisque la mort apparaît désespérante, on essaie de vivre en y pensant le moins possible. Notre société se concerte d’ailleurs pour cacher les signes qui rappellent cette réalité inéluctable : plus d’exposition du défunt dans un salon, crémation pour éliminer au plus tôt le cadavre, brève cérémonie sans signification profonde,…

Jésus annonce sa mort

La mort pourtant est le moment ultime et suprême de notre existence terrestre. Or le terme d’un mouvement, d’une évolution, est le plus important, celui qui couronne et qui donne un sens à tout ce qui précède. C’est pourquoi Jésus a les yeux fixés sur la fin de son existence, qu’il évoque en détail par trois fois dans les Évangiles synoptiques (Matthieu, Marc et Luc).

Lorsqu’il délaisse la foule qui le déçoit, pour se concentrer sur l’instruction de ses disciples, Jésus concentre son enseignement sur ces trois annonces de sa mort et de sa résurrection. Mais, chaque fois, les évangélistes notent que les disciples ne comprennent pas cet enseignement et, même, qu’ils ne veulent pas comprendre ce qui contredit leurs rêves humains et nationalistes.

Après la première annonce (Mt 16, 21-23), Pierre s’insurge vivement contre cette destinée de son Maître, le Messie. Jésus, à son tour, le traite de « Satan », parce que Pierre répète la troisième tentation du diable (Mt 4, 8-10), qui contredit la mission divine que Jésus a reçue de son Père. Dans l’Évangile d’aujourd’hui, Jésus annonce pour la deuxième fois la tragédie qui l’attend à Jérusalem, mais les disciples ne comprennent pas et ne veulent pas connaître la vérité en interrogeant leur Maître. Après la troisième annonce de sa mort (Mt 20,17-19), Jacques et Jean demanderont les premières places dans le Royaume d’un Messie qu’ils attendent triomphant. Les dix autres disciples manifesteront la même ambition.

Dieu livre son Envoyé

L’action de « livrer » le Christ Jésus est attribué dans les évangiles à Dieu et…à Judas. Pourquoi cette trahison de l’apôtre, livrant son Maître, est-elle également rattachée à Dieu ? Voilà le mystère du plan de salut que Dieu réalise à travers la faute ignoble de la trahison d’un apôtre. « Dieu écrit droit avec des lignes croches. » (Paul Claudel) Quand on désespère de notre humanité et de nous-mêmes, nous pouvons toujours espérer que le Seigneur accomplira son projet de vie en dépit des injustices révoltantes de notre monde.

Le Dieu que Jésus nous a révélé est bien le Seigneur tout-puissant, mais il n’est pas un potentat dominateur, il n’est pas un super Jupiter. Sa toute-puissance n’est pas une force brutale. C’est l’amour de Dieu qui est tout-puissant, qui se donne, qui se « livre » dans l’Incarnation de son Fils et qui se « livre » à nous dans chaque eucharistie. Dieu est infiniment grand, mais il est le plus grand dans le service par amour. « Vous m’appelez Maître et Seigneur » et pourtant je vous ai lavé les pieds, comme le ferait un esclave (Jn 13, 13-15).

Le sens de la mort chrétienne

Les disciples de Jésus représentent notre humanité, qui essaie de se cacher la fin de son pèlerinage sur terre, qui considère la mort comme la tragédie inéluctable et scandaleuse. L’attention de Jésus, au contraire, se fixe sur la fin de sa vie, qui semblera marquer la faillite complète de sa mission. Il nous enseigne que la fin de notre existence est le sommet qui donnera un sens à tout ce que nous aurons vécu.

Aucune philosophie, ni aucune théologie, en dehors de l’Évangile, n’ouvre une issue à la tragédie de la mort, l’angoisse centrale de toute vie humaine. Jésus nous a montré que la mort, librement acceptée dans la confiance et l’amour, ouvre à la présence de Dieu. La mort nous vide de nous-mêmes et de notre égoïsme pour accueillir l’Amour transcendant. La croix nous dépouille de tout, elle nous réduit à la plus profonde pauvreté. Dans la première béatitude, la plus fondamentale, celle des pauvres, le Christ a promis à ces bienheureux d’entrer dans le Royaume de la vie, de la joie et du bonheur.

Jean-Louis D’Aragon SJ

(Français) 2022/09/23 – Lc 9, 18-22

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Après avoir accompagné leur Maître pendant un certain temps, les disciples ont pu soupçonner le mystère de sa personne. En contraste avec la foule qui est simplement enthousiaste, ils croient que Jésus parle et agit au nom de Dieu, qu’il est un envoyé du Seigneur. Pour que ses disciples parviennent à cette foi, Jésus “prie à l’écart”. La prière de Jésus attire souvent l’attention de l’évangéliste Luc, qui la mentionne toujours juste avant un moment significatif dans la mission du Christ. La mention de cette prière ici montre que la profession de Pierre, au nom des autres disciples, élève ceux-ci à un niveau nettement supérieur à celui des gens ordinaires. La prière de Jésus leur procure la foi, cet accueil de la révélation de Dieu: “Ce n’est pas un être humain qui t’a révélé cette vérité”, déclare Jésus à Pierre, “mais mon Père qui est dans les cieux.” (Mt 16,17)

Les opinions des gens

Tout ce qui vient de Dieu déconcerte: “Mes pensées ne sont pas vos pensées, mes voies ne sont pas vos voies.” (Is 55,8) Ses interventions dans l’histoire sont mystérieuses. Les contemporains de Jésus perçoivent bien en lui un certain reflet du divin, mais ils n’atteignent pas le coeur de sa personne. Sans le don de la foi, il est impossible d’atteindre l’ineffable. Leurs opinions vont dans différentes directions, mais toujours pour assimiler Jésus à un personnage célèbre du passé.

Jean Baptiste avait tellement impressionné les gens qu’il n’était pas disparu, pensaient-ils, même après la nouvelle que le roi Hérode l’avait exécuté. Élie, de son côté, n’était pas mort, car un char de feu l’avait emporté vers le ciel. Ces opinons populaires étaient évidemment erronées, car ces personnages étaient morts et n’étaient pas revenus sur terre. En un sens pourtant, les gens avaient raison, car ces envoyés de Dieu avaient suscité une vague de foi en Dieu, qui se perpétuait dans le temps. Le Seigneur s’était révélé en eux et leur influence ne s’était pas arrêtée avec leur mort.

Depuis deux mille ans, le mystère de la personne de Jésus continue d’interpeller et de déconcerter le monde. Tout en l’admirant, les gens cèdent sans cesse à la tentation de le réduire à l’image limitée de leurs rêves: il aurait été un révolutionnaire, un sage,…

La profession de Pierre

Jésus délaisse les opinions du peuple pour s’adresser à ses disciples, qu’il veut élever à un registre différent: “Et vous, qui dites-vous que je suis ?” La réponse devrait venir du groupe des disciples, mais c’est Pierre qui répond en leur nom: “Tu es le Messie de Dieu,” celui qui a reçu l’onction, celui qui, en vertu de ce signe, appartient à Dieu et le représente. Après s’être soumis humblement au baptême de Jean, “L’Esprit descendit sur lui (Jésus)…et une voix se fit entendre du ciel: Tu es mon Fils bien-aimé; je mets en toi toute ma joie.” (Lc 3,22) Il est Celui vers qui toute l’histoire du salut converge, Celui qui a mission de transfigurer notre humanité par une existence nouvelle. Le Messie accomplit la fonction de ceux qui, dans l’histoire ancienne, recevaient l’onction, les rois, qui avaient le devoir de rassembler le peuple dans l’unité.

Seule la lumière de Dieu nous éclaire sur la personne de Jésus. Le Christ le déclare à Pierre après sa profession de foi: “C’est mon Père qui te l’a révélé”. Il affirme solennellement que personne ne connaît par lui-même, ni le Père, ni le Fils: “Personne ne connaît le Fils si ce n’est le Père, et personne ne connaît le Père si ce n’est le Fils et ceux à qui le Fils veut le révéler.” (Mt 11,27)

Un Messie humilié et rejeté

Comment aurait-on pu imaginer l’Envoyé de Dieu condamné par les autorités de son peuple, livré aux païens et crucifié? Toujours inspiré par l’imagination humaine à courte vue, on se représentait la figure du Messie comme un chef de guerre, triomphant de tous les ennemis d’Israël. Jamais on n’aurait pensé qu’il puisse venir dans notre monde comme un enfant, pauvre et démuni. Comment admettre qu’il sortirait de cette province méprisée, la Galilée? (Jn 7,52) Saint Paul le constate: “Les Juifs demandent des miracles (la puissance éclatante), tandis que les Grecs recherchent la sagesse (ce que la raison peut comprendre).” (1 Cor 1,22) Pour le monde qui se pense croyant, Dieu est le Tout-puissant qui domine l’univers et qui peut tout bouleverser en un instant. Il serait un Zeus, un Jupiter ou un Baal, mais infiniment plus puissant, indépendant de l’univers qu’il contrôle et dirige.

Jésus nous apprend que Dieu est tout-puissant, non pas comme une force extérieure qui écrase, mais à l’intérieur du monde, en chacun(e) de nous, par son amour. Sur sa croix, Dieu présent dans son Fils est l’Amour qui se livre, qui se donne. Tel est le mystère de notre salut. On comprend que Jésus défende à ses disciples de révéler immédiatement ce mystère, sans précaution, car le peuple autour de lui le rejetterait comme une folie ou le déformerait selon ses préjugés.

Jean-Louis D’Aragon SJ

(Français) 2022/09/22 – Lc 9, 7-9

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La mission des douze disciples dans les villes et villages de Galilée précède immédiatement ces réflexions du peuple et d’Hérode au sujet de Jésus. Les disciples ont proclamé l’Évangile et fait connaître la personne de Jésus. La ferveur nationaliste, et même révolutionnaire, fermentait dans toutes ces localités, qui étaient hostiles à Hérode, le valet des Romains,. Aussi Hérode craignait tout nouveau mouvement populaire, qui pouvait devenir subversif. Même Jean Baptiste, qui prêchait la conversion loin de la Galilée, près du Jourdain, dans le désert, avait provoqué sa peur et son hostilité. Il pouvait craindre encore plus Jésus, dont l’activité missionnaire se déroulait en plein coeur de la Galilée, ce foyer des révoltes contre l’autorité politique. Quand on n’a pas la foi, comme Hérode, c’est le soupçon qui tourmente le coupable.

Jésus est un mystère

Après avoir fait exécuter Jean Baptiste, Hérode entend parler de Jésus et se pose des questions sur ce nouveau personnage. Au fond de lui-même, il souffre de remords : il a eu l’illusion de se débarrasser de Jean, mais l’activité de Jésus ressuscite pour lui la figure de Jean. On ne libère pas sa conscience avec une action brutale. La punition vient de notre conscience, qui nous juge.

La personne de Jésus, comme sa mission qui vient de Dieu, est un mystère. Aussi certains pensent que Jésus est une réincarnation de Jean, ou du prophète Élie ou d’un autre prophète d’autrefois. Pour comprendre le présent, on se réfère tout naturellement à ce qu’on connaît, au passé et à ses figures éminentes. À toutes les époques, on a tenté de comprendre la personne de Jésus avec des critère humains, alors qu’on ne peut le connaître qu’avec les yeux de la foi éclairée par l’Esprit. En dehors de la foi, Jésus ne peut être qu’une énigme déconcertante et incompréhensible.

Hérode est un assassin curieux et en proie au remords. Il n’a ni la foi, ni le minimum d’empathie pour comprendre un envoyé de Dieu. Aussi Jésus ne lui répondra rien quand, au moment de la passion, il comparaîtra devant lui (Lc 23,9).

Jésus dérange

« Mes pensées ne sont pas vos pensées et mes chemins ne sont pas vos chemins », déclare le Seigneur (Is 55,8). Les prophètes, que Dieu a envoyés et qui parlèrent en son nom, ont toujours ouvert des perspectives qui ont déconcerté le peuple. De même, et encore plus que tous les prophètes, Jésus ouvre des horizons infinis devant nous et il nous met en question, exigeant de nous la conversion, un changement radical.

Les prophètes et Jésus ont subi la persécution, parce qu’ils dérangeaient la routine et la paresse dans laquelle chacun s’est installé. Personne n’aime être dérangé et obligé de remettre en question sa conduite et sa personne. Hérode a essayé de réduire Jean au silence. Il voudra s’en prendre également à Jésus, que des Pharisiens avertiront : « Pars d’ici, va-t’en ailleurs, car Hérode veut te faire mourir. » (Lc 13,31)

Conclusion

Dans une prière, on s’adresse à Dieu, « Toi qui viens me déranger. » C’est la prière du croyant, qui sait à l’avance que le Seigneur va le déranger, par un signe, une épreuve, une maladie,… En toute confiance, il remet sa personne entre les mains de son Père, qui veut son bonheur mieux et plus que lui-même. Il est convaincu avec Paul que « Dieu fait tout concourir au bien de ceux qu’il aime » (Rom 8,28).

Sans la foi, tout devient énigme incompréhensible et parfois révoltante. Il faut croire pour comprendre. La promesse de Jésus à Marthe se réalise alors : « Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu » (Jn 11,40).

Jean-Louis D’Aragon SJ

(Français) 2022/09/21 – Mt 9, 9-13

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Au début de son roman, Plus grand que l’amour, Dominique Lapierre présente une jeune indienne, qui toute joyeuse, prépare son prochain mariage. Soudain, elle aperçoit une tache noire sur son bras. Sa famille découvre qu’elle a la lèpre et, de honte, elle la bannit. Errante et désespérée dans les rues de Calcutta, elle trouve enfin un refuge dans un « mouroir » de Mère Teresa. Une fois guérie de sa lèpre, elle entre dans la Communauté des Sœurs de la Charité. Après de nombreuses étapes, elle vient à New York pour soigner des jeunes atteints du sida. Elle prend soin assidûment d’un jeune juif, qui s’écrie devant son dévouement, « Vous êtes plus grande que l’amour. »

L’ancien film « Monsieur Vincent », esquissait une scène semblable, opposant la charité à l’égoïsme et au rejet. La scène se déroulait dans une petite localité de France. À l’arrivée de Vincent de Paul, des notables de la place lui dirent qu’ils avaient enfermé et emmuré une vieille femme et sa fille atteints par la peste. « Ils peuvent mourir, mais nous, nous survivrons. » Vincent se hâte vers la maison où sont prisonniers les pestiférés, enlève les poutres clouées sur les portes et les fenêtres, il les libère et les soigne.

Dans une petite ville du Québec, des religieuses projetaient d’ouvrir une maison de transition pour réhabiliter des délinquants sortant de prison et pour préparer leur réinsertion dans la société. La réaction fut vive pour s’opposer à une telle initiative. Voici une réaction typique exprimée à la radio : « Je suis favorable à la réhabilitation des prisonniers, mais pas dans ma rue. » On s’estime généreux en pensée, mais on refuse de rendre concrète cette apparente générosité.

Deux attitudes s’opposent radicalement face à la lèpre et à la peste : se replier égoïstement sur soi-même ou se donner aux autres par amour. Devant le mal, la lèpre et la peste morale, nous retrouvons les deux mêmes réactions : éviter tout contact avec ces « rejets » de la société, en se drapant dans sa vertu, ou bien aller vers eux pour qu’ils connaissent l’amour. Confronté aux pharisiens qui le dénoncent, Jésus manifeste l’amour conquérant de Dieu.

Ce comportement du Christ provoque trois scandales chez ses adversaires :

1) Jésus appelle un publicain, un pécheur, pour devenir son disciple et son apôtre.
2) Il déclare que Dieu ne veut pas les sacrifices, mais l’amour.
3) Finalement, Jésus affirme qu’il est venu pour sauver les pécheurs, mais non les justes.

Jésus appelle un publicain

Un collecteur d’impôt remplissait une fonction de pécheur aux yeux du peuple juif. Il exploitait les gens en exigeant plus que ce qui était dû, pour augmenter ses profits. Un publicain, juif ou païen, ne pouvait témoigner dans un procès, car on n’avait aucune confiance dans sa parole, preuve de la défiance et du dédain qu’ils suscitaient. De plus, il collaborait, lui, un juif, avec l’occupant romain.

Matthieu n’a donc rien pour mériter sa vocation de disciple et d’apôtre du Christ. Jésus prend l’initiative de l’appeler, par pure gratuité, sans lui poser aucune condition. Il appelle ce pécheur à devenir le compagnon de révolutionnaires zélotes, de nationalistes violents, comme Simon et Judas. Tel est l’amour de Dieu, qui appelle chacun de nous, gratuitement, au salut, à la vie et au bonheur, indépendamment de notre passé.

Autre scandale : Jésus mange avec les pécheurs

L’hospitalité et la nourriture ont une valeur sacrée en Orient, car elles permettent de partager les mêmes moyens de subsistance. Consommer le même pain, c’est le signe d’une vie devenue commune. Aussi les Pharisiens défendaient de prendre son repas avec des pécheurs et même de partager avec un païen ou un pécheur un peu de nourriture. Il fallait éviter toute contamination, comme la peste. Si on arrivait d’une région ou d’une maison païenne, on devait secouer la poussière de ses pieds pour ne rien emporter dans la Terre Sainte. Le simple contact avec un pécheur ou un païen rendait impur. On comprend alors que les Pharisiens s’insurgent contre la conduite de Jésus, qui prend son repas avec les amis de Matthieu, des publicains et des pécheurs.

Pour se défendre, Jésus se compare à un médecin. L’Envoyé de Dieu a mission de guérir les blessés de la vie. Que dirait-on d’un médecin que ne voudrait traiter que les gens en bonne santé ? Le Christ, représentant l’amour de Dieu, pourrait être comparé à un père ou une mère, qui manifeste sa miséricorde à l’égard du « mouton noir » de la famille. Un artiste bien connu chez nous a décrit toute la souffrance que son fils cadet lui a infligée. Pourtant il s’écrie à la fin de son témoignage : « Celui m’a fait le plus souffrir, c’est celui que j’aime le plus. » Voilà l’image de l’amour gratuit de Dieu, révélé par Jésus, le Christ.

La miséricorde, plutôt que les sacrifices

Jésus montre, comme d’habitude, que sa conduite et son enseignement se situent dans le prolongement des prophètes. Osée (au 8e siècle av. J.C.), comme Isaïe avant lui et plusieurs autres prophètes, dénonce au nom de Dieu les sacrifices qui ne proviennent pas du cœur, des sacrifices qui n’ont pas d’âme. Cette déclaration du prophète exprime si bien la pensée de Jésus que Matthieu la répète à 12,7. C’est le seul exemple dans le N.T. où la même citation de l’A.T. se retrouve deux fois dans le même livre. On s’illusionne en offrant de tels sacrifices extérieurs, qui n’engagent pas la personne qui les offre, qu’aucune conversion n’accompagne. On s’estime purifié, en règle avec le Seigneur, alors que son cœur demeure aussi égoïste.

Il est vrai que Dieu est infiniment miséricordieux, toujours disposé à pardonner, mais son amour ne peut atteindre celui qui ferme son coeur, qui s’illusionne en offrant seulement un sacrifice extérieur. Suffirait-il d’offrir une victime extérieure, même la plus sublime ? Participer à l’eucharistie sans aucun engagement de soi-même, c’est du ritualisme sans âme, donc sans valeur.

Plutôt que l’offrande des sacrifices, Dieu veut que nous participions à sa miséricorde, en l’accueillant en nous-mêmes et en la répandant autour de nous. Le Seigneur nous prévient qu’il nous accorde son pardon, mais à condition de le communiquer à nos frères et sœurs. Sinon, nous perdons le pardon qu’il nous a accordé, comme le mauvais serviteur de la parabole (Mt 18,32-34). Si nous ne transmettons pas les dons que Dieu nous a donnés gratuitement, nous les perdons. « On ne possède bien que ce que l’on donne ».

Conclusion : comment agir face au mal ?

Le titre « Pharisien » signifie « séparer ». Les pharisiens se séparaient de tout ce qui leur paraissait mal. Pour protéger leur identité de fidèles observateurs de la Loi, ils ne voulaient avoir aucun rapport avec des gens vivant en contradiction avec la volonté de Dieu. Ils s’écartaient d’eux comme de la peste qui mène à la mort. Pour se protéger et se sauver, ils s’enfermaient en eux-mêmes, dans une réaction de répulsion et dans un repliement stérile.

Pour Jésus, au contraire, c’est l’amour qui doit animer son disciple. L’amour déborde du cœur de celui qui donne, il est dynamique et conquérant. Il va vers les marginaux, les délaissés et les parias. Même les personnes les plus endurcies ne résistent pas indéfiniment à un amour généreux et désintéressé.

Jean-Louis D’Aragon SJ

(Français) 2022/09/19 – Lc 8, 16-18

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Au premier regard, ce bref évangile est désarmant, déconcertant. On a l’impression que Jésus ne parle pas pour se faire comprendre. On peut bien sûr saisir le premier morceau du discours au premier degré : c’est effectivement absurde d’allumer une lampe si l’on ne veut pas qu’elle éclaire. Mais qu’entend Jésus par « Rien n’est caché qui ne doive paraître au grand jour; rien n’est secret qui ne douve être connu.. »? Ou encore, que peuvent bien signifier ces affirmations paradoxales : « …celui qui a recevra encore; et celui qui n’a rien se fera enlever même ce qu’il paraît avoir?» En fait, le texte ne révèle son sens que quand on sort de Luc pour chercher une clé d’interprétation ailleurs.

De toute évidence, dans ce passage, Luc reprend Marc en l’abrégeant (Mc, 21-25). Cela permet de comprendre d’abord que c’est ce raccourci qui rend difficile le texte proposé aujourd’hui à notre méditation. On saisit ensuite que le passage évoque ce que les spécialistes de Marc ont appelé « le secret messianique. » La lumière dont parle Jésus n’est rien d’autre que lui-même, le Fils d’amour, le Révélateur, le Messie. C’est lui, la lampe qui luit au fond d’un lieu obscur et qui dissipe les ténèbres pour éclairer à jamais la nuit du monde.

Chez Marc, ce discours est adressé aux disciples, non pas à « la foule ». Jésus leur fait des confidences. Il leur révèle un secret qui, un jour, sera proclamé sur les toits. Ce qui est encore caché au monde, il le transmet uniquement au cercle de ses intimes car ce sont eux qui devront faire connaître le secret et le révéler « au grand jour ». Par là, Jésus annonce déjà le temps de l’Église : le temps de la mission où ceux qui auront appris le secret devront le transmettre au monde, à leurs risques et périls. Et quand leur « inintelligence » ne leur permet pas de comprendre, Jésus prend la peine de leur donner des explications en un langage moins énigmatique. Cette stratégie se justifie par le fait que le danger est partout. Les représentants de la loi conspirent pour perdre Jésus. Ce dernier sait qu’ils finiront par l’avoir, mais ils arriveront trop tard car il aura déjà transmis le secret.

Si l’on prend cet angle d’attaque, même les deux phrases paradoxales de la fin deviennent compréhensibles. « Celui qui a recevra encore. » De qui s’agit-il? Très probablement, de celui qui a reçu le secret, qui a compris que Jésus est la lumière et, qui est dans les bonnes dispositions pour en savoir davantage. Quant à celui qui n’a rien, et qui risque de perdre même ce qu’il croit avoir, on devine qu’il s’agit du conspirateur qui se range parmi ceux qui cherchent à rayer Jésus du nombre des vivants. Ce qu’il croit avoir, c’est la loi de Moïse qui le rend sourd et aveugle. Car il croit que la loi a été donnée une fois pour toutes aux fils de la promesse. Il perdra tout car la nouvelle loi, la nouvelle alliance rend caduque toute discrimination. C’est une autre manière de répéter à ceux qui refusent de se convertir en prétextant qu’ils ont Abraham pour père : « Car, je vous le dis, des pierres que voici, Dieu peut susciter des enfants d’Abraham » (Lc 3, 8). Aujourd’hui, c’est à nous que s’adresse cette sévère mise au point : nous, juifs, chrétiens et musulmans qui, comme au temps de Jésus, croyons encore que le seul titre de « fils d’Abraham » suffit au salut.

Melchior M’Bonimpa

(Français) 2022/09/17 – Lc 8, 4-15

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Dans toute vie réside une puissance en sommeil. Tous, nous avons vu un arbre poussé dans l’anfractuosité d‘un rocher, ou plus simplement quelques brins d’herbe surgir au milieu d’un trottoir. Ces signes révèlent la force tranquille de la vie. Jésus compare la parole de Dieu à cette vie que rien ne peut arrêter. À un moment où ses disciples peuvent se décourager devant l’incompréhension ou l’indifférence du peuple, Jésus leur montre que, en dépit des indifférences et des refus, rien ne peut arrêter la puissance de la Parole.

Cette parabole du Semeur est devenue le symbole de l’évangélisation, que certains groupes bibliques ont adopté pour affirmer qu’ils poursuivent le ministère du Christ Jésus, en proclamant sa Parole. Cette parabole est riche de sens, car elle signifie, dans un premier moment, la puissance de la Parole en elle-même et, dans un second moment, elle attire l’attention sur les dispositions des divers groupes qui accueillent cette Parole.

Sens de la parabole pour Jésus et ses disciples

La coutume dans l’Orient ancien veut que l’on répande d’abord la semence, puis qu’on laboure. La semence tombe un peu partout, même si le terrain est peu favorable. Dans le même champ, se trouvent des sols de divers genres: chemin de traverse, des roches, des ronces et de la terre fertile.

Jésus mentionne quatre genres de terrains pour rappeler qu’il adresse la Parole à tous les auditoires, qu’ils soient favorables, indifférents ou hostiles. La Parole de salut vient de Dieu, qui, par amour, veut offrir le bonheur et la vie à toute personne. En dépit des obstacles, la Parole prouve sa puissance par les fruits en abondance qu’elle produit.

À toutes les époques, la déception guette l’Église face à la réception tiède ou hostile de son message de salut. La nouvelle évangélisation produit aujourd’hui, en apparence, de maigres résultats. Mais le Seigneur nous promet, à travers cette parabole du semeur, que la persévérance, appuyée sur la puissance vitale de la Parole de Dieu, produira une récolte étonnante. La vie triomphera de l’indifférence et de la mort.

Pourquoi des paraboles ?

Nous avons tous connu des gens qui cultivent une surdité sélective. Ils entendent seulement ce qui leur convient, s’enfermant dans leurs idées et leurs préjugés. Ils ne veulent pas enrichir leur pauvreté, l’ouvrir sur l’expérience des autres.

Nous sommes tous affligés de surdité ou de cécité sélective. Sans le vouloir, nous sommes limités, car nous n’entendons pas les sons qui résonnent en dehors de nos capacités. Notre registre de vision est restreint : nous ne voyons pas les rayons infrarouges, ni les rayons ultraviolets. Ces limites auditives et visuelles devraient nous rendre conscients que notre intelligence et notre cœur sont également limités.

Comment parler de réalités au-delà de nos sens, sinon au moyen de symboles qui les suggèrent? Pour en comprendre, toutefois, la signification, il nous faut un minimum d’empathie. C’est notre responsabilité de prêter l’oreille, selon l’exhortation de Jésus à la foule : « Celui qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende ! » Écouter la Bonne Nouvelle, c’est approfondir nos convictions évangéliques, prêter attention aux signes des temps, nous ouvrir à des opinions nouvelles ou même contraires à nos idées. Nous ne pouvons bien comprendre qu’avec la prière, dans le silence, éclairés par la lumière de l’Esprit.

Diversité des auditeurs

Même si la Parole est puissante, elle ne peut rien sans notre disposition à l’écouter et à la rendre vivante dans notre personne. Lorsqu’elle produit des fruits dans nos actions, elle manifeste sa force de vie.

Ceux qui sont seulement curieux, qui écoutent ou qui lisent la Bible ou l’Évangile comme un livre ordinaire, sans aucune conséquence pratique dans leur existence, sont comme la semence qui tombe au bord du chemin. Ils ne savent pas que l’audition de la Parole, c’est la rencontre de Dieu, qui seul peut les sauver.

Tous les débuts d’un cheminement sont faciles, ils sont souvent accompagnés d’enthousiasme. Mais si la Parole est semée parmi les pierres, les difficultés et la sécheresse éteignent peu à peu la joie qu’elle avait suscitée. N’ayant pas de convictions profondes, les émotions superficielles disparaissent très vite. Ce fut l’enthousiasme d’un moment. La valeur d’une personne ou d’une communauté se révèle dans sa durée et sa persévérance.

Tous se plaignent que la vie moderne est devenue trépidante, remplie d’échéances et de soucis. Nous avons développé des besoins de plus en plus nombreux, au point de ne plus savoir ce qu’est une vie simple, axée sur l’essentiel. Nos préoccupations multipliées rendent nos journées et nos semaines éreintantes. Avec de telles pressions, la prière devient difficile, sinon impossible. Combien de fois entendons-nous : « Je n’ai pas le temps de prier ou de participer à l’eucharistie ! » Tout dépend évidemment de la hiérarchie de nos valeurs. Si l’audition et la méditation de la Parole sont le dernier de nos soucis, il est clair que nous n’aurons jamais le temps de nous arrêter pour rencontrer notre Père et Seigneur.

La vie de foi est une plante fragile, qui exige un entretien assidu pour survivre et se développer. La culture de la foi consiste d’abord à prier régulièrement, d’implorer l’Esprit Saint de nous accorder ses dons, entre autres la fraîcheur du regard comme celui d’un enfant, toujours émerveillé par ce qu’il découvre, et l’amour actif, qui témoigne de la présence du Seigneur en nous et autour de nous.

Les attitudes différentes de ces quatre groupes qui accueillent la Parole nous interpellent. En expliquant cette parabole, le Christ nous demande si nous nous reconnaissons dans l’un ou l’autre de ces groupes d’auditeurs.

Jean-Louis D’Aragon SJ

(Français) 2022/09/16 – Lc 8, 1-3

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La présence de femmes avec Jésus

Ces femmes qui accompagnent Jésus ont dû déconcerter le peuple de l’époque. Les disciples eux-mêmes s’étonnent quand ils découvrent Jésus parlant à une femme de Samarie. (Jn 4, 27) Un rabbin ne devait même pas parler à une femme en public. Un juif hassidique avouait dernièrement à un journaliste qu’il ne saluerait pas sur la rue l’épouse de son meilleur ami.

Nous ignorons le genre des esprits qui avaient réduit ces femmes à l’état d’esclaves. Pour elles, comme pour tous ceux qui accueillent la Bonne Nouvelle, le Christ les a libérées de tout ce qui asservit et dégrade. Il les a rehaussées à la dignité de filles de Dieu. L’une de ces femmes était tombée dans un état d’esclavage très grave. Tout ce qui était mal et qu’on ne pouvait expliquer était attribué au démon. Le chiffre « sept » indique ce qui est complet. « Sept démons » signifie donc que la déchéance de Marie était tragique et désespérée. Son surnom « Madeleine » signalait qu’elle était originaire de Magdala, une petite localité au sud-ouest du lac de Galilée.

L’époux de Jeanne était intendant du tétrarque de Galilée, Hérode. Sa fonction d’intendant était importante et elle le plaçait à un niveau élevé de la société. En appelant la femme de cet intendant à le suivre, Jésus l’a donc associé à une pécheresse méprisée de tous, Marie Madeleine. L’appel du Christ nous rend tous égaux dans la famille de Dieu.

Ces femmes, libérées du mal par Jésus, sont le vivant exemple du miracle de la conversion et de la foi. Une fois revenues d’une déchéance profonde, elles manifesteront une générosité totale. Elles suivront fidèlement le Christ jusqu’à la croix, pendant que les apôtres s’enfuiront. Elles enseveliront Jésus, elles seront présentes au tombeau le matin de Pâques et, au Cénacle, elles prieront, avec les disciples, dans l’attente de l’Esprit Saint (Actes 1, 14).

Les figures féminines chez Luc

L’évangéliste met en relief plusieurs personnages féminins, toujours présentés sous un jour favorable. La mère de Jésus domine évidemment « L’Évangile de l’enfance » (chap. 1-2), mais la mère de Jean Baptiste, Élisabeth, et Anne la prophétesse entourent Marie. Dans le reste du 3e Évangile, relevons seulement les passages propres à Luc :

– la pécheresse pardonnée (7, 36-50) ;
– la veuve de Naïm, à qui Jésus rend son fils unique (7, 11-17) ;
– Marthe et Marie reçoivent Jésus (10, 38-42) ;
– la louange adressée à la mère de Jésus par une femme (11, 27s) ;
– les deux paraboles de la femme qui cherche sa pièce de monnaie perdue (15, 8-10) et la veuve importune qui insiste pour obtenir justice (18, 1-8) ;
– sur le chemin du Calvaire, un groupe de femmes manifestent leur sympathie à Jésus (23, 27-31).

Ajoutons les passages les plus caractéristiques des Actes des apôtres :

– Marie, la mère de Jésus, et un groupe de femmes attendent avec les apôtres la venue de l’Esprit Saint (1, 14) ;
– la résurrection de Tabitha (9, 36-42) ;
– les disciples se réunissent régulièrement chez Marie, la mère de Jean Marc (12, 12) ;
– Lydie et sa maison se convertissent et accueillent chez elle Paul et ses compagnons (16, 13-15) ;
– Aquila et Priscille accueillent Paul et deviennent ses proches collaborateurs (18, 2.26).

Luc considère les femmes, comme les pauvres, forment un groupe prédestiné au Royaume de Dieu. Il a constaté que les personnes qui accueillaient l’Évangile étaient avant tout des pauvres et des femmes. Devenant plus consciente de sa pauvreté et de sa misère, que l’homme, surtout dans un monde où la force violente dominait, la femme paraissait à Luc mieux disposée à remettre sa destinée au Seigneur et à recevoir gratuitement son salut.

Jean-Louis D’Aragon SJ

(Français) 2022/09/15 – Jn 19, 25-27

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Le texte est un moment de la Passion selon saint Jean. Les soldats ont fini de tirer au sort les vêtements de Jésus. Des femmes se sont approchées de la croix: Marie Madeleine, Marie, femme de Cléophas et Marie, la mère de Jésus. Il y a aussi ce disciple, identifié comme celui que Jésus aimait. Jésus dit à sa mère en parlant de ce disciple: Femme, voilà ton fils. Et il dit au disciple: Voici ta mère. Le texte conclut: A partir de ce moment, le disciple la prit chez lui.

Le texte, par sa brièveté et en ne disant rien des sentiments de ceux qui sont là, invite le lecteur à voir le sens de ce moment. L’événement est plus important que ceux qui y participent, pris individuellement.

Lors de l’Annonciation, Marie a accueilli la parole de Dieu en répondant: Voici la servante du Seigneur. Après cela, ce que Luc dit sur elle, est qu’elle conservait avec soin toutes ces choses (les événements) et les méditait dans son coeur. Il répètera cela pour des choses qu’elle ne comprenait pas (Luc 2,51). Elle est donc simplement une présence. C’est cette présence à Cana qui lui fait faire une demande bien discrète à Jésus. Au pied de la croix, elle continue à être une présence.

A Cana, Jésus avait répondu d’abord que son heure n’était pas encore venue. Maintenant, cette heure qui termine et complète sa mission est arrivée. Cette heure, où il doit passer par la mort, est une nouvelle naissance: c’est l’accès à la gloire avec son humanité. Marie est donc présente à cette nouvelle naissance.

Mais en rendant l’esprit, il donnera l’Esprit Saint. C’est donc aussi la naissance de l’Église et c’est ce que cette scène représente. Cette scène a été reproduite dans des icônes qui ont pour titre: icône de la prière. On voit Jésus en croix. Au pied de la croix, à gauche, il y a Marie. A droite, il y a le disciple que Jésus aimait. Marie et le disciple ont le visage tourné vers Jésus et l’explication est qu’ils prient pour l’Église d’où le titre d’icône de la prière. Marie est présente à cette naissance de l’Église.

Marie est la première chrétienne puisqu’elle est la première à avoir cru. Avec le premier disciple, premier au point de vue accueil et foi (Jean 20,8), elle représente le début de l’Église. Mais Jésus en lui donnant un autre fils lui donne un nouveau rôle: elle doit être la mère de l’Église. Elle sera une mère qui continuera à être une présence: elle sera présente à la prière des disciples avant la Pentecôte (Actes 1,14). Et elle continue ce qu’elle a commencé au pied de la croix: elle prie pour nous.

Jean Gobeil SJ 

(Français) 2022/09/14 – Jn 3, 13-17

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Introduction

Au début de sa première lettre aux chrétiens de Corinthe, Paul leur rappelle que le Christ crucifié est le cœur de l’Évangile qu’il leur a proposé. Il avait décidé de leur proclamer « rien d’autre que Jésus-Christ et, plus précisément, Jésus-Christ crucifié. » (1 Cor 2,3s) Après sa déconvenue devant les « sages » de l’Aréopage d’Athènes, Paul arriva à Corinthe « faible et tout tremblant de crainte. » Il avait résolu de mettre de côté l’éloquence brillante, pour prêcher « le Christ crucifié, message scandaleux pour les Juifs et folie pour les païens. (1 Cor 1,23)

Comment le Christ en croix, cet objet d’horreur pour les anciens, peut-il être source de salut et de vie ? Ce monde opposé à Dieu pense trouver le salut dans la puissance qui domine, qui écrase les ennemis. Il est convaincu que la faiblesse ne produit rien, sinon l’humiliation et la prostration. Quand il croit en Dieu, ce monde se le représente comme un super Jupiter, comme le Maître de l’univers.

C’est pourquoi Pierre, inspiré par le monde et Satan, s’insurge contre la destinée de Jésus, qui vient d’annoncer à ses disciples qu’il subira une condamnation infamante à la mort. Dans une vive réaction, contre l’intervention de Pierre, représentant l’esprit du monde, juif et païen, le Christ le stigmatise comme inspiré par le diable (Mt 16,22s).

Descendu parmi nous et monté au ciel

« Le Fils de l’homme » désigne Jésus, qui représente tous les humains et qui les rassemble en lui. En descendant du ciel, il s’abaisse pour assumer notre condition fragile et misérable, partageant tout avec nous, sauf le péché. Pourquoi une telle humiliation, qui répugne à la raison humaine ? La réponse se trouve dans l’amour mystérieux de Dieu pour le monde. (Jn 3,16) Ce monde pourtant est rebelle, animé par la haine et ennemi de Dieu. Comment peut-il attiré l’amour de Dieu ?
Quand on parle de cette manière, on s’inspire de notre amour humain, égoïste, qui veut posséder ce qu’on prétend aimer, parce qu’on le juge aimable et attrayant. L’amour véritable est le contraire de l’égoïsme : il ne veut pas posséder et dominer, mais donner tout, jusqu’à sa vie. En raison de son amour, Dieu donne tout dans son Fils unique, acceptant d’être cloué, impuissant, sur une croix. À la suite de leur Seigneur, les disciples du Christ ont la vocation de se donner par amour et de prouver cet amour, même à l’égard de leurs ennemis : « Faites du bien à ceux qui vous haïssent, bénissez ceux qui vous maudissent et priez pour ceux qui vous maltraitent. » (Luc 27s).
Dans son humiliation extrême sur la croix, le Fils de l’homme, et l’humanité qui s’unit à lui par la foi, donne tout et se livre dans une parfaite confiance à Dieu, source de la vie et du bonheur. L’Alliance est rétablie par ce sacrifice entre l’humanité et Dieu, l’amour du Fils qui donne tout répond enfin à l’Amour infini de Dieu.

L’unique sécurité de notre humanité ne réside pas en nous, dans notre fausse richesse et dans nos découvertes scientifiques, mais dans l’amour infini de Dieu. « Dieu est amour » (1 Jn 4, 8.16) répète Jean. Tel est le cœur de notre foi, auquel il faut répondre par notre amour, qui donne tout, jusqu’à notre vie.

Contempler l’amour de Dieu dans son Fils

Cet amour de Dieu, révélé dans son Fils incarné et crucifié, n’est pas un événement isolé dans l’histoire du salut. Ce plan divin s’est déjà manifesté dans les ombres du Premier Testament, qui annonçaient son plein accomplissement en Jésus. Lorsque le peuple élu cheminait péniblement à travers le désert vers la Terre que Dieu lui promettait, la confiance venait à lui manquer et la révolte éclatait contre cette folle aventure et contre le chef mandaté par Dieu, Moïse. En coupant ainsi le lien vital de la foi en Dieu, le peuple se retrouvait démuni devant le mal, qui prenait la forme de serpents venimeux. « Ils mordirent un grand nombre d’Israélites, qui en moururent. » (Nombres 21, 6)
Ce peuple qui s’insurge contre la volonté de Dieu s’inscrit dans la longue lignée de notre humanité, qui se révolte contre le projet de salut que Dieu veut réaliser. Lorsqu’on refuse de faire confiance au Seigneur, on s’isole pour découvrir sa pauvreté et son impuissance. Le peuple prend alors conscience de son péché : « Nous avons péché en vous critiquant, le Seigneur et toi (Moïse) ! », s’écrie le peuple. À la prière de Moïse, Dieu lui ordonne de façonner un serpent de métal et de le fixer sur une perche. Quiconque regardera avec foi le serpent aura la vie sauve. Par ce regard de confiance en Dieu, le canal de vie se rétablit avec la source du salut.
C’est en contemplant avec foi le Christ en croix que nous pouvons accueillir le salut définitif et la vie éternelle. Le Crucifié incarne l’expression parfaite de l’amour de Dieu, qui donne tout. Par ce regard de foi, nous devenons progressivement Celui qui a tout donné par amour. Notre regard transforme alors notre égoïsme en amour.

Jean-Louis D’Aragon SJ

(Français) 2022/09/13 – Lc, 7, 11-17

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A la porte de la ville de Naïm, Jésus, accompagné de ses disciples et d’une foule, rencontre un cortège funèbre. Le défunt était le fils unique d’une femme qui était veuve. Le Seigneur fut saisi de pitié à cause d’elle et lui dit: Ne pleure plus. Il fit arrêter le cortège et ordonna au jeune homme de se lever. Le jeune s’assit et se mit à parler. Jésus le rendit à sa mère. La foule est saisie de crainte et rend gloire à Dieu en disant qu’un grand prophète s’était levé et que Dieu avait visité son peuple.

Jésus, accompagné de ses disciples et d’une foule, arrive à l’entrée d’un village d’où sort une autre foule accompagnant un cortège funéraire. On va enterrer le corps d’un fils unique dont la mère est une veuve. Cette femme, en plus du deuil, se retrouve dans une situation précaire: elle n’a plus personne pour la soutenir. Toute la réaction de Jésus va être vis-à-vis de cette femme.

Luc est ordinairement réticent pour parler des sentiments intimes du Christ. Mais ici il emploie un terme très fort: être remué dans ses entrailles. Il ne s’agit pas d’une pitié ou d’une compassion intellectuelle mais bien d’une pitié qui saisit physiquement. C’est ce mouvement de pitié pour cette femme qui va commander son action. Personne ne lui a rien demandé: c’est lui seul qui prend l’initiative.

A ce moment-là, Luc emploie un titre divin pour parler de Jésus, le Seigneur : En la voyant, le Seigneur fut saisi de pitié pour elle. C’est comme pour dire que cette pitié de Jésus révèle quelque chose de la compassion de Dieu. La compassion était un attribut de Dieu qui revenait souvent dans les Psaumes, les prophètes et la révélation à Moïse : Dieu de compassion et de miséricorde ou Dieu de tendresse et de miséricorde. Les sentiments et les gestes de Jésus sont donc spécialement révélateurs dans cet épisode.

Il dit à la femme: Ne pleure pas. Il s’avance et touche la civière sur laquelle reposait le corps. C’est en touchant la main de la belle-mère de Pierre qu’il l’avait guérie. C’est en touchant la main de la petite fille de Jaïre qu’il lui avait redonné la vie. C’est en touchant les yeux des aveugles de Jéricho qu’il leur rendra la vue. Il n’avait pas hésité à toucher un lépreux et le lépreux avait été guéri. On lui amenait des tout-petits pour qu’il les touchât. La foule cherchait à le toucher parce qu’une force sortait de lui et les guérissait tous. (Luc 6,19)

Il est le Seigneur. Il est le Maître de la vie. Et par pitié, pour consoler sa mère, et pour lui rendre son fils, il lui redonne la vie. Jeune homme, je te le dis, lève-toi. Lève-toi, ou éveille-toi, ou ressuscite…: c’est le même mot. C’est pour cela que des Pères de l’Église, qui eux aussi avaient été touchés par le Christ au baptême, disaient que mourir, c’est se réveiller dans le Christ.

Jean Gobeil SJ